jeudi 21 mars 2024

Dalton : Una Riflessione

Annoncé depuis un moment aux initiés, voici une sortie intéressante dans le cadre du Record Store Day 2024. En effet, le label milanais AMS publie un vinyle au format 12" mais en lecture 45 tours avec 4 pistes. Il s'agit de deux titres emblématiques tirés du LP de 1973 du groupe Dalton Riflessioni : idea d'infinito. Chaque morceau (" Riflessioni" et " Idea d’infinito) est présenté en deux versions (chantée et instrumentale). 

Les musiciens associés pour ce projet sont des tous bons : Aronne Cereda (Dalton) au chant et à la guitare acoustique, Mikael Åkerfeldt (Opeth) aux guitares électriques, Cristiano Roversi (Moongarden, Submarine Silence, Il Porto di Venere) aux claviers, Enrico Gabrielli (Calibro 35) à la flûte, Diego Petrini (Il Bacio della Medusa) à la batterie et Marco Croci (Julius Project, Maxophone, Jumbo et Submarine Silence) à la basse.

Sous la direction artistique de Cristiano Roversi et aiguillé par le seul membre original du groupe, Aronne Cereda, le projet a pris forme avec l'idée de  réenregistrer complètement deux titres du LP légendaire de 1973 avec un son moderne mais en restant aussi fidèle que possible à l’esprit d'origine. Le résultat est absolument génial et démontre que cette musique n’a rien perdu de son charme intemporel. 

Le LP Una riflessione sort le 20 avril 2024. Il est pressé en vinyle orange clair (12 pouces, 45 tours).

Label :  AMS

 

dimanche 17 mars 2024

Anandammide : Eura

En 2020, Anandammide publiait son premier album Earthly Paradise, chez Lizard Records, et ce projet drivé par un italien, joués par des musiciens de plusieurs nationalités et ancré dans le folk anglais le plus traditionnel, se révélait une belle surprise rafraîchissante (voir ma chronique ici).
Le 5 avril 2024, Anandammide sort son deuxième album, Eura, enregistré entre la France, la Suède et l'Italie. Michel Moschini, le plus français des Italiens (il vit à Paris depuis 2007), a reconduit le principe d'une formation cosmopolite, toutefois sensiblement plus étoffée qu'il y a quatre ans. Audrey Moreau, Stella Ramsden, Pascal Vernin font désormais équipe avec Lisa Isaksson, Sébastien Grignon, Lelio Mulas et Lorenzo Castigliego.Michele a en effet demandé à deux vieux amis italiens (Lelio Mulas et Lorenzo Castigliego) de le rejoindre pour cet album. Mais surtout, le groupe intègre une chanteuse en la personne de Lisa Isaksson (Me and my Kites et Lisa o Piu) dont le profil artistique colle parfaitement avec la sensibilité musicale d'Anandammide.
Eura est cette femme idéalisée, personnage clé de l’œuvre graphique (le terme bande dessinée ne me paraît que partiellement approprié) réalisée par Dino Buzzati, Orfi aux enfers, une transposition moderne du mythe d'Orphée dans le milieu de la pop de la fin des années soixante à Milan. Pour ceux qui ne voient pas (c'est le cas de le dire), Dino Buzatti avait dessiné Eura avec quatre yeux dans une tentative assez naïve d'illustration surréaliste (en fait une représentation des visages superposés des deux héros Orfi et Eura).
Avec ce deuxième album, Anandammide se détache partiellement des influences médiévales et baroques qui étaient si prégnantes sur Earthly Paradise pour se rapprocher d'un folk progressif plus contemporain, celui du début des seventies. Et par la même, la musique délaisse son orientation acoustique pour discrètement s'électrifier. Mais il reste l'essentiel, c'est à dire une grande délicatesse dans les thèmes mélodiques proposés mais aussi un sentiment permanent d'harmonie et de sérénité. Si la flûte garde un rôle de soliste, le violon et le violoncelle sont utilisés comme un petit ensemble de musique de chambre. N'imaginez surtout pas que tout cela est naïf et lénifiant. J'en veux pour preuve un morceau comme "Phantom limb" qui possède une pulsation interne très originale. Je parle aussi des deux "singles" ("A song of Greed" et "Eura") qui ont un vrai potentiel pour toucher un public plus large tout en restant d'une qualité irréprochable.    
Au gré de l'écoute des morceaux, vous serez surpris de penser à des noms connus et pas des moindre, souvent plus par un effet de mimétisme que par une volonté délibérée d'imitation. Côté prog, je vous cite comme çà à la volée le early Pink Floyd (dans la première partie de "A song of Greed", dans certaines intonations chantées de "Post Atomic Reverie"), Caravan ("I am a flower") et même Porcupine Tree (la suite d'accords de "The Anchorite"). Côté folk c'est plus diffus, je vous laisse chercher mais vous verrez que vous  découvrirez bien d'autres références au détour d'un couplet ou d'un refrain, références qui étaient  de toute façon déjà évoquées dans la chronique du premier album.
Anandammide c'est toujours aussi harmonieux et poétique, onirique aussi ("The Orange Flood" et "Dream n° I") mais avec Eura le projet de Michele Moschini franchit un cap important. D'abord, car il montre sa capacité à évoluer et à ne pas se cantonner dans le genre folk anglais médiéval qui a quand même ses limites. Ensuite car je trouve que l’électrification de sa musique lui permet de gagner en relief et en intensité. Enfin, car je pressens un troisième album encore plus abouti et encore plus progressif (peut être est-ce aussi un souhait de ma part que voudra bien entendre Michele !).
Si je devais résumer cet album en un mot, ce serait sérénité.

Le groupe: Michele Moschini (chant, guitares, synthé, orgue, batterie), Lisa Isaksson (chant sur 2, 6, 10), Audrey Moreau (flûte), Stella Ramsden (violon), Sébastien Grignon (violoncelle), Lelio Mulas (basse sur 2, 3, 4, 8, 10), Pascal Vernin (basse sur 1, 5, 6, 7 et 9), Lorenzo Castigliego (guitare électrique sur 6)


La tracklist (les titres soulignés peuvent être directement écoutés sur YT) :
01. Carmilla
02. A song of Greed (2ème single)
03. Post-Atomic Reverie
04. Phantom Limb
05. I am a Flower
06. Eura (1er single)
07. The Orange Flood
08. Lullaby n° II
09. Dream n° I
10. The Anchorite

L'album est sorti aux formats LP et CD ainsi qu'en numérique chez Sulatron Records (distribution : Clearspot)
Le lien bandcamp du groupe : Anandammide

 

 

jeudi 14 mars 2024

Acqua Fragile : Moving Fragments

Quand je parlais l'autre jour (dans l'article concernant le nouvel album de Semiramis) de résurrections récentes de vieux groupes avec des revenants moisis, je faisais allusion, entre autres, à Acqua Fragile et à ce Moving Fragments qui n'apporte rien au schmilblick et qui dessert le nom du groupe plus qu'autre chose. Tout n'est pas mauvais bien sûr ("Black drone", avec David Jackson aux vents, sauve l'honneur) mais il y a beaucoup trop de défauts dans cet album pour le justifier. Je ne détaille pas par pudeur mais disons quand même qu'il y a quelques initiatives que je qualifierais de malheureuses du côté chant. A New Chant sorti en 2017 me semblait plis digne d'intérêt. Et pourtant, j'ai de l'affection pour Bernardo Lanzetti, vous le savez !     

Le groupe : Bernardo Lanzetti (chant, guitare), Stefano Pantaleoni (claviers), Claudio Tuma (guitares), Rossella Volta (chant), Franz Dondi (basse), Piero Canavera (batterie, percussions, voix).

Musiciens invités : Stef Burns (guitare sur 2), Brian Belloni (guitare sur 4), Davide Piombino (guitare 7 cordes sur 5), David Jackson (saxophone et flute sur 6), Gigi Cavalli Cocchi (batterie sur 1 et 6), Sergio Ponti (batterie sur 4 et 9).

La tracklist :

1. Her Shadlows Torture
2. White Horse on Dope
3. Moving Fragments
4. Malo Bravo
5. IA - Intelligenza Artificiale
6. Black Drone
7. DD Danz
8. Il Suono della Voce
9. Limerence Ethereal

dimanche 3 mars 2024

Leviathan : Hearthquake (redux 2024)

Ne voilà-t-il pas qu'un nom enfoui loin dans notre mémoire de progueux remonte à la surface : Leviathan ! Car voici que sort chez AMS Records Heartquake / Redux, qui est en fait le réenregistrement du premier album de ce groupe italien. Je fais court. L'histoire est simple, les trois membres encore actifs se sont payés le luxe de refaire une version améliorée de leur LP avec des moyens technologiques mais aussi avec l'expérience (et peut être des moyens financiers) qu'ils n'avaient pas à l'époque, c'est à dire en 1988. 

La formation responsable de ce redux (je crois que je ne me ferais jamais à ce mot) comprend trois membres historiques du groupe : Alex Brunori au chant, Andrea Amici au claviers et Andrea Moneta à la batterie (devenu depuis batteur de Zopp). Ils sont épaulés par Andrea Castelli, un bassiste confirmé qui joue aussi avec Il Rovescio della Medaglia, et Fabio Serra, le guitariste de Røsenkreütz, également producteur et ingénieur du son. 

Les membres du groupe précisent - je cite - " ces retrouvailles, après de nombreuses années, étaient une excellente occasion de ramener un album qui, pour beaucoup de critiques et d'experts, marquait le retour de la musique progressive sur le sol italien dans les années 80". OK, et bien moi je n'avais pas vraiment cette vision des choses, Leviathan était effectivement un des rares groupes italiens à avoir fait du prog à cette période peu porteuse pour le rock progressif mais il m'apparaissait surtout comme une copie honnête de Pendragon, Marillion, IQ et Pallas, sans plus ! Même si l'album de 1990, Bee yourself, avec sa longue suite éponyme de 19 minutes avait permis au groupe de se distinguer. Il est vrai aussi que la musique, intégralement composée par le bassiste Sandro Widerk (qui a depuis longtemps quitté le groupe) tenait bien la route. En fait, c'est plutôt au niveau de l'exécution et du chant en anglais (désastreux) que çà pêchait grave. D'où, sûrement, cette volonté de remettre les pendules à l'heure. Pourquoi pas !
Car la question est la suivante : est-ce que çà valait vraiment le coup de réenregistrer cet album ? Si je me place du côté du groupe, la réponse est indéniablement oui. Le son est vraiment excellent et les parties techniques sont jouées au top (et le chant est largement meilleur). Côté auditeur, cela dépend de la sensibilité de chacun. Cela reste du néo prog qui, du fait des trente cinq ans d'écart, devient daté. Mais je dois dire que cela permet de redécouvrir, dans de plus beaux habits, des morceaux qui méritaient le meilleur. Je pense à "Dream of the cocoon" et surtout à "Hellishade of Heavenue".
Donc, acquérir cette nouvelle version de Hearthquake (amputée de deux titres, j'ai oublié de vous le dire) a finalement du sens et devrait quand même satisfaire la partie du public particulièrement sensible à un néo pro qui est à son tour rentré dans sa période revival.

Le groupe : Alex Brunori (chant), Andrea Monetta (batterie), Andrea Amici (claviers), Andrea Castelli (basse), Fabio Serra (guitares).
 
 
La tracklist :

1. The Waterproof Grave
2. Hellishade of Heavenue
3. Only Visiting This Planet
4. Up We Go!
5. Dream of the Cocoon
6. Heartquake

C'est à écouter ici

 
Label : AMS records
Distribution : BFT.IT
 

vendredi 1 mars 2024

Edmondo Romano : Religio


On connaît bien sûr Edmondo Romano comme membre créateur des groupes Eris Pluvia puis The Ancient Veil. On sait aussi qu'il a déjà publié sous son seul nom deux superbes albums, Sonno Eliso en 2012 et Missive Archetipe en 2014 qui ont fait l'objet d'un article il y a quelques temps sur ce blog "Special Edmondo Romano".  

Dix ans après Missive Archetipe, Edmondo Romano nous propose donc le troisième volet de ce qui semble bien être une vaste fresque explorant les différentes facettes de la condition humaine. L'artworek illustrant la pochette de l’album ainsi que le titre et la note qui le suit ("The Relationship of Man with the Visible and Invisible") sont assez explicites quant au sujet principal qu’Edmondo Romano veut exposer cette fois. Ce troisième chapitre traite le pan spirituel de l'être humain. Mais il faut toutefois préciser que l'approche d'Edmondo Romano dépasse le seul côté religieux pour évoquer aussi les aracanes de la conscience humaine qui passent également par ses racines et sa culture. Les titres des treize pistes vous en diront un peu plus sur le cheminement mystique emprunté par Edmondo Romano.

La solide équipe qui l'accompagne comprend beaucoup de musiciens qui ont l'habitude de travailler avec Edmondo dont le fidèle Alessandro Serri mais aussi Kim Schiffo, Ilaria Bruzzone ainsi qu'un certain Roberto Tiranti parmi les voix, un Roberto toujours aussi étonnant. Ecoutez la chanson "What I want to be" et dites à moi à quel timbre de voix, il vous fait penser. C'est assez bluffant.

On retrouve dans cet album une caractéristique qui apparaissait déjà de manière flagrante avec les deux précédents disques solo d'Edmondo Romano. En effet, le Génois s'affranchit de toute contrainte stylistique pour se permettre une totale liberté de création qui fait que d'un morceau à l'autre, on passe dans un univers musical complètement différent. Edmondo Romano peut se permettre ce genre d'acrobaties tant il maîtrise parfaitement les différents codes musicaux, qu'il s'agisse de courants et de mouvements comme le jazz, la musique contemporaine, le minimalisme, la M.E proche de Terry Riley, l'ambient ou encore de langages (musicaux) ethniques (balkans, Amérique du Sud, Orient et Extrême Orient) dont la forme la plus contemporaine, et la plus facile d'accès, reste la world music. 

Le résultat est d'une richesse folle et il faudrait des heures (et des pages) pour décortiquer chaque morceau. Ce n'est pas le but de cette modeste chronique qui n'est là que pour vous alerter sur cette sortie d'album et vous donner envie de l'écouter. Alors si vous êtes en quête d'une musique à la fois ambitieuse et dépaysante, totalement originale et nourrissante, cet album est fait pour vous. Pour rester dans le registre religieux (même si bon...je vais pas m'étaler sur mes convictions en la matière), ce disque s'écoute comme une messe. Si vous avez un doute, prenez le temps de savourer "in estasi" et "il colore del mio corpo", deux morceaux qui s'écoutent dans un état de total recueillement. Mais ne croyez quand même pas que l'on est dans le contemplatif extrême. Le déjà cité "What I want to be", la deuxième partie d"Agape" (magnifique !), l'insaisissable "La seduzione" et surtout "l'urlo eliso" devraient finir de vous convaincre de la grande beauté mais aussi du caractère indispensable de cet album. Une œuvre rare, tant par sa richesse que pas sa qualité intrinsèque, qui doit absolument trouver son public du fait de son caractère inclassable. Je compte sur vous !

Les musiciens :

Edmondo Romano: saxophones soprano et sopranino, clarinettes en si majeur, en do et en mi majeur, clarinette basse, duduk, chalumeau, low whistle, kanjira, claviers, programmations
Voix : Simona Fasano, Karin Selva, Giulia Beatini, Roberto Tiranti, Paola Cialdella, Vera Marenco, Lydia Giordano, Egle Doria, Silvia Napoletano, Edmondo Romano, Yoko Hanzai (narrateur sur 9)
Tina Omerzo: piano
Luca Falomi: guitare électrique
Alessandro Serri: guitare classique, basse acoustique
Roberto Piga, Teresa Valena: violons
Ilaria Bruzzone: violon alto
Kim Schiffo: violoncelle
Riccardo Barbera: contrebasse
Rodolfo Cervetto: batterie
Olmo Manzano: Percussions
 

La Tracklist :

01 - La creazione (4.07)
02 - Il sacrificio (2.16)
03 - What I want to be (7.27)
04 - In estasi (2.41)
05 - Agape (6.23)
06 - Il colore del mio corpo (3.20)
07 - La seduzione (3.38)
08 - Le tourment (3.44)
09 - Nel mio andarmene (4.06)
10 - La parola IO (4.30)
11 - La scelta (3.26)
12 - Ritus (5.08)
13 - L’urlo eliso (2.41)  

Çà vient de sorti chez Visage Records et c'est distribué par Egea Music.