samedi 27 septembre 2025

Caravaggio : We all we are


Cette année, le festival Veruno 2 Days + 1, c'était un peu Noël avant l'heure avec plusieurs sorties d'album programmées pour coïncider avec cette évènement devenu désormais la place la plus importante du prog en Europe. Il suffit pour s'en convaincre de constater le nombre conséquent de nouveaux venus chaque fin d'été à Revislate, dont beaucoup de Français d'ailleurs.  
Avec les excellents et accrocheurs singles "Isolation et "Rejoice", présents sur l'EP publié l'année dernière,  nous avions déjà eu un avant-goût de ce que pourrait donner ce nouveau disque de Caravaggio. Il n'empêche ! We all we are surprend quand même. Ce constat est d'autant plus inattendu que le groupe garde son identité si particulière couvrant un spectre assez improbable qui va du folk méditerranéen au prog métal (dosé mon frère, dosé !) en passant par l'art rock et le post rock. Mais voilà, ses membres, et en particulier Fabio Troiani et Vittorio Ballerio, semblent n'avoir aucunement l'intention de faire du sur place et encore moins envie de reproduire à l'infini la même recette. 
De fait, ce deuxième album intronise Caravaggio comme une formation créative qui démontre une évidente envie d'aller explorer de nouveaux paysages sonores avec comme un fil rouge, cet accordéon, instrument emblématique du son du groupe. Le piano à bretelles est souvent présent discrètement comme une évidence, mais parfois aussi il est introduit dans un univers musical décalé par rapport à son registre naturel, et ça fonctionne bien aussi !
Même si je reste un peu dubitatif sur le côté U2/Joshua Tree de "In the place where I was born", je dois dire que je n'ai pas bouder mon plaisir à l'écoute de cet album qui m'a parfois gentiment bousculé ("We all we are") pour mieux me  charmer ensuite avec "Controversial" ou encore avec "Behind the mask" (également présent sur l'EP de 2024), un morceau articulé en deux parties : tout d'abord, une simple chanson un peu triste et très mélancolique, avec un accompagnement minimaliste, puis ensuite une deuxième section entamée par un riff métal. On y retrouve les ingrédients qui forment la marque de fabrique du groupe avec ce chant généreux et cet accordéon qui s'invite partout mais ne s'impose jamais. "Behind the Mask, part 2" est réellement un titre aventureux, rempli de rebondissements qui garde pourtant une grande fluidité.
Mais tout cela, c'est sans compter avec la dernière piste, "Divine comedy Tarantella", une composition hybride (une de plus !), entraînante, au pouvoir littéralement envoûtant. Cette fin en forme de derviche tourneur pourrait d'ailleurs faire penser à une transition voire à un passage mystique vers le prochain album. 
En attendant, je n'ai pas fini d'écouter et de savourer cet album si original et si décalé par rapport à un rock progressif italien plus classique. 

Pour les amateurs d'art, la couverture est une reproduction d'un tableau du peintre Giuseppe Pellizza da Volpedo, intitulé Il quarto stato, une huile sur toile que vous pouvez contempler au Musée d'Art Moderne de Milan.

Le groupe : Vittorio Ballerio (chant), Fabio Troiani (guitares, programmation), Serhan Kazaz (guitares, bouzouki, chant sur 6), Stefano Spitale (accordéon), Piero Chiefa (basse, glockenspiel), Alessio Del Ben (batterie).
Avec :  Guido Block (chœurs), Tiziano Chiapelli (accordéon sur 3), Margherita Fossati (choeurs sur 3), Giulia Bertassi (accordéon sur 8), Lorenzo D'Erasmo (percussions et flûtes sur 9).

La tracklist :

1. Isolation
2. Rejoice
3. In the place where I was born
4. We all we are
5. Controversial
6. White lies on our black tongues
7. Behind the mask, Part 1
8. Behind the mask, Part 2
9. Divine comedy Tarantella




Releases information

Cover: Guiseppe Pellizza da Volpedo
Label: Ma.Ra.Cash Records
Format: CD, Digital
September 5, 2025

mardi 23 septembre 2025

Elisa Montaldo : Il fascino dell'Insolito (chronique)


Voilà un nouveau projet parallèle d'Elisa Montaldo qui m'a fasciné dès sa mise en chantier. Pour qu'il n'y ait pas de quiproquo, je précise tout de suite qu'il s'agit d'un projet insolite en marge du prog (vous noterez au passage les deux allusions discrètes au titre de l'album) .
Ce disque, un peu particulier, présente neuf thèmes musicaux qui illustraient des séries télé des années 70 en Italie, le plus souvent diffusées sur des chaînes de la RAI. Tous ces téléfilms avaient la particularité de baigner dans le mystère ésotérique et de mélanger le fantastique avec la science-fiction. Tous les génériques ont été composés par des compositeurs italiens réputés : Bruno Nicolai, Romolo Grano, Mario Migliardi, Stelvio Cipriani, Egisto Macchi, Riz Ortolani, Berto Pisani. De manière assez étonnante, nous avons une nouvelle fois travaillez en même temps sur des sujets proches avec Elisa puisque mon dernier livre Le cinéma de genre italien comme vous ne l'avez jamais entendu, évoque nommément tous ces compositeurs ainsi que les téléfilms en question.
Je garderais longtemps en mémoire la première audition de ce CD en conditions Hifi chez Black Widows avec Elisa Montaldo et Massimo Gasperini, un moment réellement émouvant et prenant, tout particulièrement à l'écoute de la dernière piste "Ho incontrato un'ombra".
De manière assez inattendue, mais finalement pas si étonnante que cela, ces morceaux collent parfaitement au style musical d'Elisa Montaldo. Elle y apporte en plus une profondeur qui fait la différence. De fait, le rendu musical obtenu par Elisa est absolument remarquable tant par le soin qu'elle a mis à reproduire l'atmosphère de ces thèmes que par la sensibilité toute personnelle qu'elle y apporte. Le sentiment d'effectuer un voyage en arrière dans le temps est absolument troublant. L'illusion est parfaite. Pour ceux, rares en France je le concède, qui ont regardé ces téléfilms, il y a évidemment une forme de nostalgie qui s'installe à l'écoute de ces vieux génériques. 
Elisa Montaldo réussit parfaitement son entreprise de régénération de ces thèmes aux atmosphères mystérieuses, témoins d'une époque où l'euphonie musicale était encore la norme. Il est en tout cas bien difficile de résister à ce petit plaisir, certes un peu suranné, mais tellement doux et gracieux.

Ce CD a été pressé à 100 exemplaires. Voici le lien bandcamp d'Elisa Montaldo pour le commander.
Bandcamp Elisa Montaldo
Quelques copies sont également en vente chez Black Widow Records. 

La tracklist : 

  1. Voci notturne 
  2. La dama dei veleni
  3. Il segno del comando
  4. A come Andromeda (écoute possible en cliquant sur le titre)
  5. Il fauno di marmo
  6. L'amaro caso della baronessa di Carini
  7. ESP
  8. Rittrato di donna velata
  9. Ho incontrato un'ombra

Crédits : 

Elisa Montaldo : piano, claviers, synthétiseurs, theremin, lyre, sons et effets, voix.  

Mastering au studio Neraluce de Barbara Rubin  

L'artwork, à la fois approprié et original, est signé Maira Pedroni (cf. aussi son travail pour Albus Diabolus).

 


 

dimanche 21 septembre 2025

Il Segno del Comando : Sublimazione (chronique)


Il y a quelques semaines le groupe Il Segno del Comando annonçait la sortie d'un album live pour juillet 2025. Un petit évènement en soi puisque que jusque là, en fait de live, nous avions seulement un enregistrement, datant de 2017, certes réalisé en conditions live mais en studio, nommé Il Segno del Comando : ... Al passato, al presente, al futuro...Live, un album présenté sur ce blog à l'occasion de sa réédition 2024, chronique ici.
Mais cette fois, c'est du sérieux puisque nous avons l'essentiel du concert assuré par les génois le 31 janvier 2025 à Pesaro, soit sept morceaux auxquels ont été ajoutés trois titres bonus provenant d'un concert un peu plus ancien (30 octobre 2022) en Hollande, pour une durée totale d'écoute de 78 minutes. Pour ses trente années d'existence, le groupe s'offre donc enfin un vrai album live et quel album!
Car au-delà du fait que la set-list jouée constitue une sorte de best of des meilleurs titres d'Il Segno del Comando, nous avons enfin l'opportunité de pouvoir entendre le vrai son du groupe en conditions live. Et je peux vous affirmer que cela fait toute la différence notamment au niveau des parties de guitares qui sont une des vraies forces des génois en concert avec les deux guitaristes, Davide et Roberto, qui ont la bonne habitude d'aligner des soli de folie à tomber par terre. C'est aussi l'occasion de savourer le chant de Riccardo Morello dont la voix s'épanouit dans sa nudité la plus naturelle, sans filet, confirmant l'excellence de ce chanteur, évidemment irrésistible sur "Sulla via della veglia". Et puis, il y a bien sûr l'inamovible Diego Banchero, véritable pilier du groupe, impérial au passage sur l'instrumental sur "Aseità", dont les lignes de basse soutiennent solidement l'ensemble de l'édifice. Il est épaulé dans sa mission rythmique par Paolo Serboli, le dernier arrivé (avec au passage un petit salut amical à Fernando Cherchi). Enfin, il est plaisant d'entendre parfaitement les accompagnements de Beppi Menozzi aux synthés et ainsi se rendre compte que le claviériste génois connaît sur le bout des doigts les codes du rock progressif symphonique italien, comme il le démontre sur "La taverna dell'angelo" ou encore sur "Il mio nome è menzogna" par exemple. 
Tout est exceptionnel dans ce live, mais si vous voulez appréhendez au mieux l'essence même de ce groupe, alors écoutez en priorité l'emblématique "Il segno del comando" qui tient autant de l'orgie sonore gothique que du festival pyrotechnique en mode dark prog (en même temps, je m'en veux déjà de ne pas citer les autres morceaux, tiens "Il mio nome è menzogna" ou "Missa nigra" au hasard !).
Ne soyez pas surpris : la prise de son est à la fois brute et généreuse, sans aucun fard. C'est ce qui fait tout l'intérêt de ces captations car c'est réellement comme cela que sonne cette formation capable de délivrer un flot musical à la fois puissant, efficace et roboratif. 
Cet enregistrement rend donc vraiment justice au groupe génois qui après trois décennies sur le pont, sans jamais baisser la garde, peut aujourd'hui légitimement être considéré comme un des grands noms du prog italien contemporain. Quod erat demonstrandum !
Sublimazione n'est pas un album juste "essentiel" mais un live absolument "indispensable" à posséder.
 
Le groupe : Diego Banchero (basse), Davide Bruzzi (guitare et claviers), Roberto Lucanato (guitare), Riccardo Morello (chant), Beppi Menozzi (claviers, 1 à 7), Paolo Serboli (batterie, 1 à 7), Fernando Cherchi (batterie, 8 à 10).
 

La tracklist:

  1. Il domenicano bianco
  2. Sulla via della veglia
  3. Nel labirinto spirituale
  4. La bianca strada
  5. La taverna dell’angelo
  6. Il segno del comando
  7. Aseità
  8. Il mio nome è menzogna (bonus track)
  9. Missa nigra (bonus track)
  10. Il calice dell’oblio (bonus track)
Petite précision très utile : cet album est réalisé en auto-production. Je vous mets donc ici l'adresse du site du groupe Il Segno del Comando pour vous permettre de faire vos petits achats directement !

vendredi 19 septembre 2025

G.O.L.E.M. : Still Life (EP)

 

Le groupe G.O.L.E.M. a profité de son passage en opener au Festival 2 Days + 1 de Veruno, le 5 septembre 2025, pour présenter un EP, Still life,  faisant suite aux deux albums Gravitational Objects of Light, Energy and Mysticism de 2022 et Gathering Of the Legendary Elephant Monsters de 2024.
Nous avions eu un avant goût de ce nouveau travail avec la sortie en mai 2025 d'un 45 tours vinyle comprenant uniquement le morceau "Born erased". Cette fois l'EP propose la suite intégrale Still life en trois parties pour une durée totale de 14 mn 40.
Alors, vous allez me dire que le titre Still life vous rappelle quelque chose. Et pour cause, Van der Graaf Generator est bien une des sources d'inspirations du groupe à défaut d'être une influence musicale directe, quoique ! Nous allons en reparler justement.
Car cet EP marque une forme de rupture avec le passé musical du groupe. Si "Born erased" porte encore les stigmates d'un bon gros hard prog, avec "Sons of death" et "Still dreaming", les musiciens de G.O.L.E.M. semblent vouloir évoluer vers un son plus fluide, s'éloignant du heavy prog pour flirter avec un rock sombre et quasi atmosphérique, mâtiné de quelques parties abstraites, à la limite de l'expérimental, placées en arrière-plan. Bien que l'ambiance générale reste gothique, on décèle une volonté d'ouvrir l'horizon musical vers quelque chose de plus expressif, nettement proche d'un format chanson exaltant une poésie noire (tiens tiens !) dans la deuxième et surtout dans la troisième partie de la suite. 
Voilà une mutation stylistique plutôt inattendue mais toutefois bienvenue. Le groupe semble à l'aise dans ce registre différent qui, accessoirement, convient très bien au timbre vocal de Marco Vincini. 
Cette nouvelle voie explorée par G.O.L.E.M. demande maintenant une concrétisation sur un format album, mais en tout cas cet EP en forme de teaser ne peut que donner confiance pour la suite. 
L'EP a été pressé à 100 exemplaires, je ne saurais trop vous conseiller de vous précipiter sur l'objet car pas mal de copies sont déjà parties.

Le groupe : Paolo Apollo Negri (orgue et synthétiseurs), Marco Vincini (chant), Emil Quattrini (pianos électriques, mellotron), Marco Zammati (bassse), Francesco Lupi (batterie). 

La tracklist : 

1. Still life (Part 1) : Born erased

2. Still life (Part 2) : Sons of death

3. Still life (Part 3) : Still dreaming

Label : Black Widow Records