mardi 4 août 2020

Le coin des vinyles : Crac! (Area)


Area : Crac!
33 tours, LP
Label : Cramps 940.512 CRS LP 5103 (1975)

Même si je place le séminal Arbeit Macht Frei bien au dessus de tout ce qu’à fait Area ensuite, je dois reconnaître que Crac! reste un album fascinant. La prise de pouvoir de Capiozzo et Fariselli vers une irrémédiable orientation jazzy voire free jazz est ici momentanément contrebalancée par Demetrio Stratos, de plus en plus esseulé dans le groupe (*), qui arrive pourtant à nouveau à marquer de son empreinte vocale cet album. Caution Radiation Area (1974) avait complètement dérapé dans des élucubrations sonores et des délires expérimentaux qui finissaient par n’avoir ni queue ni tête. Certes il y avait « Cometa Rossa » mais même ce morceau avait un drôle d’arrière goût rappelant un peu trop « Luglio Agosto Settembre (Nero) » pour être franchement  honnête.

Comme je l’évoquais en préambule, sur Crac! Demetrio Stratos réussit à faire à nouveau passer sa propre vision de ce que peuvent (doivent ?) être des explorations musicales qui ont du sens. Alors oui « L’elefante Bianco » reprend une nouvelle fois la thématique de la « Cometa  Rossa » et donc de « Luglio Agosto Settembre (Nero) »  mais en se hissant cette fois au niveau de l’original.  Oui « La Mela Di Odessa » est un drôle de morceau à la croisée des chemins entre le jazz rock et le funk mais çà swingue drôlement et il s'en dégage un vent de folie absolument irrésistible. Demetrio joue le jeu dans ce registre pourtant assez inusité pour lui, et se transforme en prêcheur déjanté dans la deuxième partie du morceau. Mais surtout, avant d’écouter « Gioia E Rivoluzione », morceau sans doute le plus « normal » qu’ait jamais enregistré Area, entre chanson d'auteur et ballade country, il y a les deux pièces maîtresses de l’album, « Megalopoli » et « Nervi Scoperti »  qui sont de fait deux formidables fusées traçantes de jazz fusion qui suivent chacune une trajectoire ascendante durant laquelle les musiciens s’amusent à aller tester les limites de l’équilibre structurel de chaque morceau. Pour moi, Crac!  s’arrête au milieu d’ « Implosion », la fin de ce morceau et le suivant (« Area 5 ») renouant avec le côté le plus stérile d’Area.  Heureusement, on parle là d’à peine plus de 5 minutes sur une durée totale de  37 minutes 50, il reste donc une grosse demi-heure d’écoute d’une musique qui réussit à être à la fois captivante et accessible avec des musiciens qui donnent le meilleur d’eux-mêmes quand ils restent concentrés sur leur sujet en évitant de trop s’en écarter. Avec Crac! Area affirme une nouvelle fois ce qui fait sa particularité et sa spécificité : un langage musical unique d’essence méditerranéenne capable d’amalgamer des idiomes aussi différents que le jazz, le rock, la fusion, le prog et l’expérimental, la présence incontournable de Demetrio Stratos en plus. Il va sans dire que l’anti-conformisme viscéral d’Area, encouragé et entretenu par le manager Gianni Sassi, place ce groupe à des années lumières d’un rock progressif italien qui ne s’est jamais distingué par un côté aventureux.
Une fois encore l’artwork de la pochette décoiffe et attire l’œil. C’est fait pour bien sûr et c’est évidemment Gianni Sassi qui a supervisé le design.

(*) pour tout connaître de la véritable histoire d’Area, et notamment de sa genèse, voir le chapitre qui lui est consacré dans le livre Patrick Djivas - Via Lumière.

Face A :
1. L'elefante Bianco
2. La Mela Di Odessa
3. Megalopoli (7:53) 

Face B :
1. Nervi Scoperti 

2. Gioia E Rivoluzione 
3. Implosion 
4. Area 5 


Le groupe : Demetrio Stratos, Giampaolo Tofani, Patrizio Fariselli, Ares Tavolazzi, Giulio Capiozzo








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