En 2017, Andrea Orlando nous avait gratifié avec dalla vita autentica d'un premier disque aussi inattendu que remarquable, le musicien génois étant jusque là essentiellement connu pour ses performances de batteur dans divers groupes dont nous allons reparler dans cette chronique. Après une telle réussite, il ne pouvait pas faire moins que remettre le couvert. Cinq ans ont passé, cinq années pendant lesquelles Andrea a travaillé comme un damné sur son album, quasiment jour et nuit. Seul maître d’œuvre de sa création, il aura lui aussi payé le prix de la folie de se lancer dans une telle aventure pour un musicien qui n'a d'autre choix que de devenir un artisan indépendant, obligé de se gérer en totale auto-production, le marché de la musique (y compris progressive) étant devenu une impitoyable machine désincarnée, déshumanisée, acceptant en outre les nouvelles règles malhonnêtes imposées par les plateformes d'écoute (s'il vous plaît boycottez les spotify et consorts).
Alors bien sûr, à l'écoute de ces morceaux, et ce dès "Ancore Luce", il m'est arrivé à plusieurs reprises de penser à La Coscienza di Zeno et à Il Tempio delle Clessidre mais il n'y a pourtant aucune confusion possible car Andrea a sa propre manière de développer ses thèmes avec toujours beaucoup de délicatesse et avec une manière de prendre son temps qui n'appartient qu'à lui. Les parties instrumentales s'étirent ainsi sans précipitation, apportant même une forme de plénitude auditive. Que la vie semble belle à l'écoute de "Tracce" ! Puisque je vous parle de parties instrumentales, il y a justement deux instrumentaux dans cet album, deux morceaux qui tiennent sacrément bien la route à commencer par "City 40" dont la superbe montée en puissance se révèle d'autant plus irrésistible que cette cavalcade symphonique se poursuit pendant plusieurs minutes à la manière de ...La Maschera di Cera ! On jurerait d'ailleurs que Fabio Zuffanti est à la basse ce qui n'est pas le cas puisque c'est l'efficace Pietro Martinelli qui assure aussi sur ce morceau, le même Pietro Martinelli qui officiait sur Autumnsymphony d'Höstsonaten ! Plus surprenant encore est "Il Sogno di Anastasia, pt 2" dont l'entame classique est loin de laisser entrevoir la suite qui va rapidement se muer en un prog symphonique de haut vol avec des changements de rythmes et de couleurs condensés sur à peine sept minutes. Je vous promet que ce titre a une classe folle.
Je reprends les mots de romantisme et de symphonisme, j'y ajoute celui de nostalgie et vous avez ainsi tous les ingrédients puissants qui qualifient la très belle "Stagione Lontana". Les cordes modélisées du Mellotron y déploient une ambiance feutrée entre ombre et lumière, le piano de Boris Valle indique la direction mélodique, Meghe Moschino pose sa voix envoutante d'humanité et l'on reconnaît le toucher unique et délicat de Laura Marsano à la guitare électrique. Laura fait partie de ses guitaristes dont toutes les notes jouées dans un chorus sont autant de syllabes d'un phasé qui sonne comme incroyablement humain. Elle est ici à son zenith en la matière.Il flotte en outre sur ce titre un parfum indéfinissable de "The court of the Crimson King" sans doute à cause de la manière d'utiliser le Mellotron mais aussi du fait de la lointaine parenté d'une partie de la ligne mélodique jouée par Laura Marsano lors de ses différentes interventions à la guitare lead. Mais cela cela suffit à créer le mirage.
L'album termine par "La Strada di Ritorno"qui prend la forme d'une suite construite sur un même thème interprété sur plusieurs modes et habillé avec différents arrangements. Nous avons ainsi une première et une troisième parties qui sont présentées sur un mode adagio alors que la deuxième est portée par un beat rock soutenu. Quant à son final il est aussi majestueux que somptueux avec cette magnifique pavane entre la guitare électrique de Laura Marsano et le cor anglais.
Écrire, pour finir cette chronique, qu'Andrea Orlando confirme avec ce deuxième album l'excellence constatée avec dalla vita autentica est un euphémisme. La vérité est qu'Andrea s'affirme comme un compositeur et créateur à part entière de l'école du prog génois. Ce n'est pas un mince compliment quand on connaît la richesse et la vitalité du rock progressif provenant de la grande cité ligurienne, Genova la Superbe ! En tout cas, ce disque m'a donné beaucoup de bonheur. Je vous en souhaite autant.
Les Musiciens : Andrea Orlando (batterie, glockenspiel, orgue, piano électrique, synthés, Mellotron, Harpsichord), Meghe Moschino (chant sur 1 à 3, 5, 7), Stefano Marelli (guitares électrique et acoustique sur 1 à 4, 6, 7), Laura Marsano (guitare sur 2, 4, 5, 7), Matteo Nahum (guitare électrique sur 3), Pierenzo Alessandria (guitare électrique sur 6), Pietro Martinelli (basse et contrebasse sauf 5), Fabio Zuffanti (basse sur 5), Luca Scherani (piano sur 1, 3, 4, 7), Agostino Macor (Moog sur 1, 4, 7), Boris Valle (piano sur 5), Valeria Trofa (cor anglais sur 2, 7), Marco Mascia (violon sur 4, 7), Kim Schiffo (violoncelle sur 7), Christian Budeanu (violon alto sur 7), Carlo Oneto (cor français sur 7)
La tracklist :
- Ancora Luce
- Tracce
- Il Sogno di Anastasia (parte prima)
- City 40
- Stagione Lontana
- Il Sogno di Anastasia (parte seconda)
- La Strada del Ritorno
Le bandcamp d'Andrea (vous avez juste à cliquer sur le lien surligné)
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