J’avoue écouter indifféremment des CD et des vinyles, voire
même des cassettes. Opposer un support à un autre me paraît totalement inutile.
Quand vous savez comment, d’un côté, le son peut être travaillé, modifié,
transformé à l’envie. Quand vous constatez, de l’autre côté, que la manière
dont chacun perçoit le son dépend de tellement de facteurs dont certains sont
totalement empiriques et sujets à interprétation. Il apparaît alors que les
débats vinyles versus CD sont vains (surtout à l'ère du tout numérique dématérialisé) et peuvent durer indéfiniment en encombrant
les pages des réseaux sociaux sans satisfaire personne.
Pour ma part, quand je mets un vinyle sur la platine, il
s’agit d’un disque original pressé
durant les années soixante et soixante dix (ce qui tombe bien car cela
correspond à la période à laquelle les styles de musiques que j’écoute ont été
produits), jamais de réédition, rarement de vinyle récent (sauf quand mes amis
musiciens sortent une édition spéciale vinyle que je me fais alors une joie de
posséder). L’inconvénient des vieux vinyles réside principalement dans le fait
qu’il faut être prêt à affronter les inévitables crépitements et craquements, plus ou
moins répétés et plus ou moins supportables selon l’état de l’exemplaire
possédé. Mais au moins, je suis dans une logique qui est la suivante : si
je choisis d’écouter un vinyle, c’est pour le son particulier qui sort de la
lecture du sillon. Pour cela, et pour que tout soit en cohérence et que çà ait
vraiment un sens, il faut que les données lues soient à 100% analogiques. Qu’est ce que cela veut dire ? Pour moi,
c’est très simple, cela signifie que toute la chaîne doit être
analogique du début à la fin, en passant par toutes les étapes :
enregistrement analogique, mixage analogique, mastering analogique et support
analogique (le vinyle donc). Il n’y a
aucune position extrémiste là-dedans, juste le fait que je ne vois pas bien
l’intérêt d’écouter ces rééditions vinyles récentes qui ne sont ni plus ni
moins qu’une somme de données numériques transférées et gravées ensuite sur
vinyle ; une hérésie pour ne pas dire une imposture, quand les
informations n’ont pas été retraitées pour donner un rendu son plus moderne ou
plus présentable, ou les deux, c‘est
selon ! Combien vous pariez que c’est justement le cas quasiment à
chaque fois. Même les rééditions affichant une remastérisation à partir des bandes originales analogiques subissent un traitement numérique. Il ne peut en être autrement. Ceux qui imaginent entendre, avec une réédition actuelle, le son à l'identique du vinyle de l'époque peuvent y croire, mais la réalité est imparable. Ce qu'ils écoutent est peut-être bon au niveau son mais ce n'est pas celui de la source originelle. Au moins, ils ne pourront pas dire qu'ils ne savaient pas.
Car j’ajouterais aussi un élément supplémentaire, essentiel
pour moi, que l’on oublie un peu trop dans l’affaire : les vinyles
originaux ont été conçus par les ingénieurs du son de l’époque qui avaient un
vrai savoir-faire en matière d’enregistrement et de mastering analogique. Je ne
pense pas que ce soit le cas aujourd’hui, et même si cela l’était, la norme en
matière de son a radicalement évoluée et un ingénieur du son actuel modélisera
le master final en se basant automatiquement sur ces références modernes, les seules
qu’il sait reproduire, non plus sur des tables de mixages constellées de
potards qu’on maniait du bout des doigts mais bien sur des logiciels
impersonnels. Pas sûr que ce soit ce
type de sonorités que je souhaite entendre quand j’écoute un vinyle. Bien sûr,
il y a une multitude de vinyles qui sont sortis à leur époque avec un son
pourri, mais bizarrement quand vous
tombiez sur ce genre de coucou (çà m’est arrivé bien sûr), vous n’aviez pas
l’impression de vous êtes fait avoir. En général, vous étiez plus désolé pour
le groupe ou l’artiste, en vous disant que ce drôle de son, étouffé ou à
l’inverse clinquant, ne lui rendait pas justice. Alors qu’aujourd’hui, acheter
trente euros une réédition pour entendre un son qui semble (qui est !)
complètement trafiqué, là vous sentez bien l’arnaque. Au passage, je n’en peux
plus de voir tous ces hipsters se la jouer « moi je ne crois que dans le
vinyle », « moi je reconnais le son du vinyle », « moi, je
crée un label pour faire des vinyles que je vais vendre très chers ». Réponse : "toi le hispter, tu restes chez toi à sniffer ton rail et tu laisses les hommes, les vrais, écouter leurs vinyles en chiquant leur bière". Je
m’étais promis de ne pas lâcher de vapeur. Désolé c’est parti tout seul.
En résumé, si vous voulez écoutez des vieux albums en vinyle, procurez vous une version
d’origine, pas une réédition. Vous aurez le « vrai » son que vous
cherchiez et en plus vous aurez le plaisir de l’objet sans le code barre au
dos. Avec un peu de chance, vous aurez même le sticker RTL au verso et l'étiquette prix du Prisunic à 59 francs au verso.
Si vous souhaitez en savoir plus sur les mystères du son
vinyle mais aussi sur le business actuel du vinyle, je ne peux que vous
conseiller de vous référer à l’étude que j’ai réalisée sur ce sujet et qui se
trouve en préambule de mon livre Plongée au cœur du Rock Progressif Italien
sorti en 2018 chez Camion Blanc.
Merci de m’avoir lu jusqu’au bout. A bientôt
Louis