jeudi 20 juin 2024

Prowlers : Orchidea

Le nouvel album de Prowlers vient juste de sortir (19 juin 2024) et son écoute confirme encore une fois tout l'intérêt de ce groupe mais aussi son originalité que l'on retrouve dès les premières mesures du morceau titre "Orchidea" avec ce canon à deux voix féminines qui met en avant ce chant contrapuntique complexe.
Orchidea se présente comme un voyage sonore qui alterne les moments d'exaltation avec d'autres nettement plus sereins. Ainsi les chansons rock ("Universi paralleli", "Il bao della luna") sont entourés par des compositions acoustiques ("Clorofilla", "Non sei mai andato via"), avec pour équilibrer le tout des mi-tempos de haute volée comme " "Bocche d'ambra".
Arrêtons-nous sur deux morceaux particuliers.
Tout d'abord ,"Non sei mai andato via" qui est une très belle chanson nostalgique écrite en hommage à Marco Premoli, le premier bassiste du groupe, décédé prématurément. La chanson est un hommage émouvant de ses amis, qui mêle mélancolie et espoir, représentant un moment de réflexion et de célébration de la vie de Marco à travers la puissance évocatrice de la musique.
L'autre piste incontournable est la longue suite "Ultimo Viaggio". Il s'agit d'une œuvre complexe organisée, comme il se doit, en plusieurs mouvements. La tradition prog est ici respectée et l'on peut savourer vingt minutes d'un rock progressif amené à son meilleur niveau, avec des changements réguliers de tempo, des passages oniriques quasi irréels et une profusions de mélodies complexes et envoutantes. Chaque mouvement de la suite est un chapitre d’une histoire musicale qui transporte l’auditeur à travers des paysages émotionnels et sonores uniques. Le tout est porté par ces entrelacs de voix de femmes, cette "partie féminine" qui reste une caractéristique forte du groupe dont la musique est incontestablement marquée par la forte personnalité artistique de Laura Mombrini.
Avec ce septième album, le groupe impose à nouveau sa sérénité et une forme de force tranquille qui lui est propre. Orchidea est un album qui confirme non seulement la maîtrise technique et créative des membres de Prowlers, mais aussi leur capacité à toucher le cœur des auditeurs avec des thèmes profonds et sensibles. Chaque piste est une partie indispensable et indissociable d’une plus grande mosaïque, qui combine l’énergie du rock électrique avec la délicatesse des ballades acoustiques, offrant un voyage musical, mais aussi une expérience introspective, qui ne peut que charmer et ensorceler l'auditeur qui veut bien prendre le temps d'écouter tranquillement cette œuvre.
Avec cet album, le groupe confirme l'excellent niveau déjà atteint avec Navigli Rifflessi et s'impose pour de bon dans le panorama du rock progressif italien contemporain, en offrant au public une œuvre qui sera autant appréciée par les fans de longue date (dont votre serviteur !)que par de nouveaux adeptes. Si ce n'est déjà fait; ne manquez pas l’occasion de plonger sans retenue dans ce voyage musical extraordinaire, ce groupe en vaut le coup.

Le groupe : Alfio Costa (claviers), Laura Mombrini (chant et chœurs), Fulvio Rizzoli (guitares et Bouzouki), Roberto "Bobo" Aiolfi (basse), Marco Freddi (batterie et percussions), Cristina Lucchini (chant et chœurs).  

La tracklist :

  1.  Orchidea
  2. Universi Paralleli
  3. Clorofilla
  4. Il bao della luna
  5. Bocche d'ambra
  6. Ultimo viaggio
  7. Non sei mai andato via

samedi 15 juin 2024

Jumbo / live in Caremma 2023 (FR/IT)



Se retrouver le 11 juin 2023 au Festival Prog & Frogs pour écouter et voir Jumbo interpréter dans son intégralité l'album Vietato ai minori di 18 anni? qui date de 1973, donc cinquante ans après, c'était à la fois un peu irréel mais aussi très amical avec comme une ambiance de famille qui régnait dans l'étable aménagée pour l'occasion (le festival se passe dans une ferme hôtel à Besate). Sur scène, le padre Alvaro Fella, Sergio Conte, Dario Guidotti, soit trois membres historiques du groupe accompagnés par deux musiciens de Consorzio Acqua Potabile (Massimo Gorlezza à la guitare et Maurizio Mussolin à la batterie) mais aussi l'indispensable Marco Croci à la basse (Maxophone). Dans la salle, Paolo Dolfini (ex membre occasionnel de Jumbo), Maurizio Venegoni (Consorzio Acqua Potabile) et votre serviteur assis entre les deux. Oui, il y avait réellement une atmosphère familiale ce jour là, quelque part dans la chaleur étouffante de la campagne léchant les rizières de la plaine du Pô.

Avant de rentrer, dans le cœur de cette chronique, il est important de préciser que Jumbo a toujours produit une musique iconoclaste, à nulle autre pareille, très théâtrale, parfois dérangeante, et donc assez éloignée du prog italien "traditionnel".
Avec un Dario Guidotti en Monsieur Loyal déjanté et un Alvaro Fella toujours aussi étonnant dans ses performances vocales, le concert ne pouvait qu'être animé, ce fût le cas. Côté musique, l'interprétation de Vietato ai minori di 18 anni? est restée incroyablement fidèle à l'original avec un son plus moderne notamment sur les parties de guitare de Massimo Gorlezza, dont j'apprécie toujours autant le toucher. Marco Croci aura relevé le défi d'apprendre ses parties de basse en un temps record et d'être impeccable dans son jeu. Sergio Conte reste un claviériste tellement agréable à écouter, toujours très fluide et lyrique dans ses parties de claviers, et Dario Guidotti est un vrai maestro des instruments à vent (au sommet sur "No!"). L'apport du jeu solide de Maurizio Mussolin à la batterie est également un plus. Mais bien évidemment le héros de la soirée a été Alvaro Fella. Il faut apprivoiser la voix de cet homme de cœur pour savoir apprécier pleinement ce chant expressif, unique et sans égal. Le vieux lion a été une fois encore magnifique. Le point d'orgue du concert a été le morceau "Vangelo" avec Alvaro déguisé en curé. Je précise que ce titre (comme une partie de l'album d'ailleurs) est une charge contre l'hypocrisie de la religion catholique."Vangelo" est réellement un morceau magnifique et prenant interprété dans une ambiance qui oscille en permanence entre le tragique et le grotesque (c'est voulu bien sûr !). Le meilleur morceau de l'album reste pour moi "Come Vorrei Essere Uguale A Te" et je dois dire que nous avons eu droit à une interprétation magistrale de ce titre emblématique de Jumbo. La dernière chanson de la set list, "Miss Rand", était en fait l'exception du soir puisqu'il s'agit d'un morceau, d'inspiration très ricaine, tiré de l'album DNA (1972). De par son côté entraînant, preque joyeux, elle constituait un final parfait. 
Le sentiment d'avoir vécu un moment privilégié dans un environnement intimiste restera mon impression forte et indélébile de cette soirée spéciale. Alvaro nous a donné rendez-vous dans cinquante ans. Nous serons présents Alvaro !  
 
La tracklist :

1. Intro - Il ritorno del signor K
2. Specchio
3. Via Larga
4. Vangelo
5. 40 gradi
6. Come vorrei essere uguale a te
7. GIL
8. NO!
9. Miss Rand

Tri-fold CD + DVD + booklet 8 pages 
Date de sortie : 25 mai 2024
Label : AMS 

Testo in italiano (a cura Maurizio Mux Mussolin e Marco Croci)

“Incontrarsi l'11 giugno 2023 al Festival Prog & Frogs per ascoltare e vedere Jumbo interpretare nella sua interezza l'album Vietato ai minori di 18 anni? Che risale al 1973, quindi cinquant'anni dopo, era allo stesso tempo un po' irreale ma anche molto amichevole con come un'atmosfera familiare che regnava nella stalla allestita per l'occasione (il festival si svolge in una fattoria hotel a Besate). Sul palco, il padre Alvaro Fella, Sergio Conte, Dario Guidotti, ovvero tre membri storici del gruppo accompagnati da due musicisti di Consorzio Acqua Potabile (Massimo Gorlezza alla chitarra e Maurizio Mussolin alla batteria) ma anche l'indispensabile Marco Croci al basso (Maxophone). In sala, Paolo Dolfini (ex membro occasionale di Jumbo), Maurizio Venegoni (Consorzio Acqua Potabile) e il tuo servo seduto in mezzo. Sì, c'era davvero un'atmosfera familiare quel giorno, da qualche parte nel caldo soffocante della campagna che leccava le risaie della pianura del Po.
Prima di entrare, nel cuore di questa cronaca, è importante chiarire che Jumbo ha sempre prodotto una musica iconoclasta, come nessun'altra, molto teatrale, a volte inquietante, e quindi abbastanza lontana dal prog italiano "tradizionale".
Con un Dario Guidotti come Monsieur Loyal pazzo e un Alvaro Fella sempre così sorprendente nelle sue performance vocali, il concerto non poteva che essere animato, era così. Per quanto riguarda la musica, l'interpretazione di Vietato ai minori di 18 anni? È rimasto incredibilmente fedele all'originale con un suono più moderno soprattutto sulle parti di chitarra di Massimo Gorlezza, di cui apprezzo ancora tanto il tocco. Marco Croci avrà accettato la sfida di imparare le sue parti di basso in tempo record e di essere impeccabile nel suo gioco. Sergio Conte rimane un tastierista così piacevole da ascoltare, sempre molto fluido e lirico nelle sue parti di tastiera, e Dario Guidotti è un vero maestro degli strumenti a fiato (in cima su "No!"). Anche l'apporto del solido gioco di Maurizio Mussolin alla batteria è un plus. Ma ovviamente l'eroe della serata è stato Alvaro Fella. Bisogna domare la voce di questo uomo di cuore per saper apprezzare pienamente questo canto espressivo, unico e senza eguali. Il vecchio leone è stato ancora una volta bellissimo. Il clou del concerto è stato il pezzo "Vangelo" con Alvaro travestito da parroco. Preciso che questo titolo (come parte dell'album tra l'altro) è un'accusa contro l'ipocrisia della religione cattolica." Vangelo" è davvero un pezzo magnifico e coinvolgente interpretato in un'atmosfera che oscilla costantemente tra il tragico e il grottesco (è voluto ovviamente!). Il miglior brano dell'album rimane per me "Come Vorrei Essere Uguale A Te" e devo dire che abbiamo ricevuto un'interpretazione magistrale di questo iconico titolo di Jumbo. L'ultima canzone della set list, "Miss Rand", era in realtà l'eccezione della sera poiché si tratta di un pezzo, di ispirazione molto ricana, tratto dall'album DNA (1972). Per il suo lato accattivante, quasi allegro, costituiva un finale perfetto.
La sensazione di aver vissuto un momento speciale in un ambiente intimo rimarrà la mia impressione forte e indelebile di questa serata speciale. Alvaro ci ha dato appuntamento tra cinquant'anni. Saremo presenti Alvaro!!”

vendredi 14 juin 2024

Podcast émission Amarok Spécial Rock Progressif Italien

Je vous propose d'écouter ou de réécouter en podcast l'émission Amarok du 13 juin 2024, animée par Thierry Joigny, spécialement consacrée au Rock Progressif Italien que j'ai eu le plaisir de programmer et de commenter pour SUN Radio.

L'avantage c'est que vous pouvez écouter le podcast où que vous soyez, en France, en Belgique, en Suisse ou au Québec. J'en profite, au passage, pour faire un grand bonjour amical aux cousins québécois qui viennent régulièrement consulter ce blog.

Voici les liens :

Lien replay plateforme MYSUN : https://lesonunique.com/mysun/podcast/15450-

mercredi 12 juin 2024

Barock Project : Time Voyager (trad. IT)

Luca Zabbini è uno dei musicisti italiani più dotati della sua generazione. Da tempo (oltre quindici anni) lo ha ampiamente dimostrato con il suo gruppo Barock Project e ora da solista. La partecipazione alla PFM, per quanto gratificante, gli ha permesso soprattutto di aumentare il suo profilo collaborando con un gruppo di fama internazionale, perché per quanto riguarda il suo talento, il ragazzo aveva già dato prova di sé in precedenza. Va detto che da Misteriose voci del 2007 la discografia dei Barock Project, composta da sei album in studio, è impeccabile, con una preferenza, per quanto mi riguarda, per Coffee in Neuköllhn

Time Voyager

Fin da "Carry on", i Barock Project fissano l'asticella con questo brano che mescola abilmente un ritornello medievale con un suono rock molto simile a quello del suo tempo, alla maniera di Ian Anderson, ma dove i Barock Project fanno subito la differenza è con questa dimensione sinfonica che porta il brano a vette insospettabili, per non parlare di un'incredibile sequenza strumentale che fa a pezzi tutto ciò che incontra sul suo cammino. L'ascoltatore è pronto per quello che verrà. E quello che segue è "Summer set you free", un rock FM ad alta quota che ti mette con le spalle al muro ed è un vero e proprio richiamo per la folla. Ma non aspettatevi un monolite in stile americano, perché i Barock Project sono sempre molto più sottili. L'atmosfera cambia con la più cupa e pesante "An ordinary day's odyssey", con i suoi due bellissimi passaggi malinconici, il primo guidato dal pianoforte, come dovrebbe essere, e il secondo orchestrato, che è l'outro. Con la sua perfezione formale, questo brano è una vera e propria lezione per tutti quei gruppi che da trent'anni si sono fatti strada in un bagno di neo prog senza trovare una via d'uscita (mi farò dei nuovi amici!).
Con "The lost ship tavern", il violino non c'è, ma restate sintonizzati perché ancora una volta le parti strumentali riservano delle belle sorprese. "Voyager" è uno dei due brani che abbiamo potuto ascoltare in anteprima. È piuttosto vicino nella forma a quello che Luca ha prodotto all'inizio di quest'anno con il suo album solista (Cinematic Stories). Ma con la voce e alcune parti più rock, il brano di otto minuti assume una dimensione completamente nuova. "Morning Train" è una canzone che scorre. Semplice all'apparenza, è in realtà sorprendentemente vivace, raggiungendo il suo apice con la lunga sequenza strumentale che rivela una delle evidenti influenze di Luca: il rock barocco dei Queen. Cosa dire della jazzata FM "Propaganda", con il sassofono in evidenza per l'occasione, se non che ancora una volta Luca Zabbini (ed Eric Ombelli, che ha co-scritto il brano) non fanno come tutti gli altri. Potrebbe suonare come molte band statunitensi, a partire dai Toto, ho scritto "potrebbe", ma no, questo è il Barock Project che si diverte a fare swing con un grande suono. "Shybuia 3 A.M." presenta per la prima volta nell'album la voce solista di Luca Zabbini. Il brano ricorda un po' l'assolo di Sting.  "Lonely girl" è senza dubbio il brano meno memorabile dell'album, forse un po' troppo polivalente, ma è comunque piacevole da ascoltare, perché Luca riesce a evitare ogni sdolcinatezza, anche quando la canzone è piena di romanticismo. Luca ha insistito per eseguire lui stesso "Mediterraneo", e posso capire perché. C'è qualcosa di molto personale in questa canzone che, con un arrangiamento leggermente diverso, suonerebbe come... PFM. In ogni caso, consiglio l'ultima parte del brano perché è lì che la band fa la differenza e lascia tutti in sospeso. "Kyanite jewel" è una composizione del solo Ombelli (per la cronaca, Zabbini ha scritto tutte le altre musiche) e in effetti c'è una netta differenza di stile, con un accompagnamento di chitarra più folk, ma questo non toglie nulla all'album nel suo complesso, anzi, perché questo brano aggiunge un tono diverso, con l'aggiunta di un sorprendente passaggio di danza ellenica che vede protagonista il bouzouki.
L'atmosfera cambia drasticamente nella traccia finale, "Voyager's homecoming", che riporta l'ispirato e brillante rock barocco che è proprio della band, confermando che non stanno usurpando il loro nome. Va detto che per "Voyager's homecoming" la band ha tirato fuori tutte le carte in regola. Anche se il brano suona come prog metal, diventa presto chiaro che il pezzo sarà molto più approfondito e complesso di quanto non sembri, con diverse biforcazioni in stili diversi. In effetti, questo brano è incredibilmente ricco. Le idee contenute in questo brano basterebbero da sole a creare un intero album (mi vengono in mente alcuni nomi, ma non li svelo!). Luca Zabbini dimostra una vera e propria abilità nel mescolare generi musicali diversi con sconcertante facilità, per poi concludere con una pepita perfettamente omogenea. E qui lo dimostra ampiamente ancora una volta.
Come ho accennato all'inizio di questa recensione, i Barock Project hanno realizzato finora solo ottimi album, e ognuno può avere una preferenza per una registrazione o un'altra (Coffee in Neukölln per me), ma ciò che è certo è che con Time Voyager la band sta rasentando l'eccellenza, che posso riassumere nella seguente formula: "Time Voyager, Luca Zabbini & Barock Project at their best in 2024".

Band : Luca Zabbini, Eric Ombelli, Marco Mazzuoccolo, Alex Mari, Francesco Caliendo
Ospiti : Alessandro Bonetti, Manuel Caliumi

Tracklist :

1. Carry On  2. Summer Set You Free 3. An Ordinary Day's Odyssey  4. The Lost Ship Tavern  5. Voyager  6. Morning Train  7. Propaganda  8. Shibuya 3 A.M.  9. Lonely Girl  10. Mediterranean  11. Kyanite Jewel  12. Voyager's Homecoming 

Time Voyager è stato pubblicato il 3 giugno 2024. Ecco alcuni link che potrebbero interessarvi: il sito web del Barock Project e la piattaforma CDCLICK per ordinare il CD.

vendredi 7 juin 2024

Barock Project : Time Voyager

Luca Zabbini est un des musiciens italiens les plus doués de sa génération. Cela fait déjà un bon moment (plus de quinze ans en fait) qu'il le démontre amplement avec son groupe Barock Project et maintenant en solo. Sa participation à la PFM, pour valorisante qu'elle soit, lui a surtout permis de se faire mieux connaître en collaborant avec un groupe à la renommée internationale, car pour ce qui est de son talent, le garçon avait déjà fait ses preuves avant. Il faut le dire : depuis Misteriose voci en 2007, la discographie de Barock Project, faite de six albums studio, est un sans faute avec une préférence, concernant votre serviteur, pour Coffee in Neuköllhn
 
Time Voyager
Dès « Carry on », Barock Project place la barre très haut avec cette chanson qui mêle habilement une ritournelle médiévale avec un rock bien de son temps, un peu à la manière d'un Ian Anderson, mais là où Barock Project fait très vite la différence, c'est avec cette dimension symphonique qui permet d'emmener le morceau vers des cimes insoupçonné sans même parler d'une incroyable séquence instrumentale qui arrache tout sur son passage. L’auditeur est mis en condition pour la suite. Et la suite, c’est « Summer set you free », du rock FM de haute volée qui brosse dans le sens du poil et qui accroche sévère. Mais n’imaginez surtout pas un monolithe à l’américaine car tout est toujours beaucoup plus subtil avec Barock Project. Changement d’atmosphère avec le plus sombre et lourd « An ordinary day’s odyssey » traversé par ses deux très beaux passages mélancoliques, mené au piano, comme il se doit, pour le premier, et orchestré pour le second qui constitue l’outro. De par sa perfection formelle, ce morceau est une vraie leçon pour tous ces groupes qui fraient depuis trente ans dans un bain néo prog sans en trouver la sortie par le haut (je vais encore me faire des copains, tiens !). Avec « The lost ship tavern », le violon est de sortie, mais restez bien à l’écoute de ce morceau car une fois encore les parties instrumentales réservent quelques belles surprises. « Voyager » est un des deux titres que nous avons pu écouter en avant-première. Il est assez proche dans sa forme de ce que Luca avait produit au début de l’année avec son album solo (Cinematic Stories). Mais avec le chant et quelques parties plus travaillées sur le versant rock, le tout pour une durée de huit minutes, ce morceau atteint alors une toute autre dimension. « Morning Train » est une chanson qui coule toute seule. Simple en apparence, elle possède en fait une étonnante vivacité qui prend son ampleur maximale avec la longue séquence instrumentale qui permet de lever le voile sur une influence évidente de Luca : le rock baroque de Queen. Que dire du jazzy FM « Propaganda » avec le saxophone qui est de sortie pour l’occasion, sinon qu’une fois encore Luca Zabbini (et Eric Ombelli qui co-signe le morceau), ne font rien comme tout le monde. Çà pourrait ressembler à plein de groupes US que vous connaissez, à commencer par Toto, j’ai écrit « çà pourrait » mais non c’est bien du Barock Project qui s’amuse à swinguer avec un gros son. « Shybuia 3 A.M. » permet d’entendre pour la première fois de l’album, la voix de Luca Zabbini en lead. Le morceau fait un peu penser à du Sting en solo. « Lonely girl » est sans doute la tune la moins marquante de l’album, peut être un peu trop passe-partout, elle s’écoute pourtant avec beaucoup de plaisir car Luca a l’art et à la manière d’éviter toute mièvrerie même quand il s’agit d’une chanson empreinte de romantisme. Luca a tenu à interpréter lui-même « Mediterranean » et je peux comprendre pourquoi. Il y a quelque chose de très personnel dans cette chanson qui, avec un arrangement à peine différent sonnerait comme du…PFM. En tout cas, je vous recommande la dernière partie du morceau parce que c’est là que le groupe fait la différence et laisse tout le monde sur place. « Kyanite jewel » est une composition du seul Ombelli (pour info, Zabbini signe toutes les autres musiques) et l’on entend effectivement une nette différence de style, plus centrée sur un accompagnement à la guitare folk, mais cela ne nuit pas à l’ensemble de l’album, bien au contraire, car ce morceau apporte une teinte différente avec en prime cet étonnant passage de danse hellène qui laisse entendre du bouzouki. Le changement d’ambiance est évidemment radical avec la dernière piste, « Voyager’s homecoming », qui permet de retrouver ce rock baroque inspiré et brillant qui n’appartient qu’à ce groupe, confirmant par là-même qu’il n’usurpe pas son nom. Il faut reconnaître que pour « Voyager’s homecoming », le groupe met le paquet. Même si ce morceau sonne prog métal, il apparaît vite évident que la pièce va être beaucoup plus fouillée et complexe qu’il n’y paraît au premier abord avec plusieurs bifurcations vers des styles différents. Ce titre est en fait d’une richesse incroyable. Rien qu’avec ce qu’il y a comme idées dans ce morceau, j’en connais qui auraient de quoi faire un album entier (j’ai des noms en tête mais je balance pas !). Luca Zabbini fait preuve d'un vrai savoir-faire pour amalgamer les genres musicaux différents avec une facilité déconcertante et aboutir ensuite à une pépite parfaitement homogène. Il le démontre amplement ici une fois encore.
Je l’évoquais en début de chronique, Barock Project n’a fait jusque-là que de très bons albums, chacun pouvant avoir sa préférence sur tel ou tel enregistrement (pour ma part Coffee in Neukölln donc) mais ce qui est sûr, c’est qu’avec Time Voyager, le groupe frise l’excellence, ce que je peux résumer avec la formule suivante : « Time Voyager, Luca Zabbini & Barock Project at their best in 2024 ».


Le groupe : Luca Zabbini (claviers, guitare acoustique, chœurs, Bouzouki, chand lead sur #8, #10, #12, basse sur #3, #7 et #8), Eric Ombelli (batterie, percussions, bouzouki, guitare acoustique, guitare électrique, chant lead sur #11), Marco Mazzuoccolo (guitares électriques), Alex Mari (chant), Francesco Caliendo (basse sauf sur #3, #7 et #8)
Invités : Alessandro Bonetti (violon sur #4), Manuel Caliumi (saxophones sur #7)

la tracklist :

1. Carry On  2. Summer Set You Free 3. An Ordinary Day's Odyssey  4. The Lost Ship Tavern  5. Voyager  6. Morning Train  7. Propaganda  8. Shibuya 3 A.M.  9. Lonely Girl  10. Mediterranean  11. Kyanite Jewel  12. Voyager's Homecoming 

Time Voyager est sorti le 3 juin 2024. Voici les liens qui peuvent vous intéresser : le site du groupe Barock Project,  et la plateforme CDCLICK pour commander le CD.


 

lundi 27 mai 2024

Trigemino : In Sound We Trust



Ah les braves petits gars, comme ils m'ont fait plaisir avec ce disque sorti de nulle part. Quel pied cette galette !
Il y a d'abord cette enveloppe accrocheuse avec ces couleurs et ces glyphes si caractéristiques, utilisés pour les lettres, qui dominent la photo sépia de cette sublime black allongée, évoquant évidemment furieusement Pam Grier, la même qui vous attend en intérieur de pochette, agenouillée cette fois. Tout y est. Nous sommes de retour dans le monde moite de la blaxploitation.
Il y a le titre de l'album ensuite, court. concis, qui va à l'essentiel : in sound we trust. Un credo, une profession de foi, une sentence à inscrire partout dans les école de musique.
Il y a, enfin et surtout, la musique ! Bien sûr, vous allez me dire " encore un groupe qui fait dans la simili musique de film seventies funky, çà commence à bien faire". C'est vrai qu'il commence à y avoir un paquet de combos sur le coup, plutôt des très bons d'ailleurs. Mais, là où les premiers de la classe de Calibro 35 font dans la perfection, la précision absolue et la reproduction plus vraie que l'original, les agités de Trigemino se différencient par un style plus spontané mais aussi plus rock avec des riffs de guitare acides et tranchants, plus psychédélique avec cette flute qui joue le rôle d'un variateur d’ambiance. Avec Trigemino, on retrouve une forme d'urgence, une envie de prendre la musique du côté fun, donc de ne pas trop se prendre eau sérieux. Et çà marche. Je dirais même, çà groove !
Enregistré en conditions live au Coffee Studio à Rome, les trois membres du groupe se sont adjoints les services de cinq autres musiciens pratiquant des instruments différents. Ce qui fait que non seulement, nous avons affaire à des instrumentistes à la technique hyper solide mais en plus cela ouvre le champ à de multiples combinaisons instrumentales, ce dont ne se privent pas les artisans de cet album pour un résultat de neuf morceaux qui sont autant de petits bijoux bien clinquants.
Dans une ambiance générale dansante parfois à la limite du convulsif, les musiciens de Trigemino plongent avec délice et volupté dans l'univers musical groovy de la blaxploitation à la sauce italienne. Çà commence fort avec "Dirty Larry", le générique funky d'un poliziottesco bon teint. La basse pulse sans prendre le temps de respirer, les cuivres fusent de partout. La fin de la piste est juste orgasmique. C'est ensuite au tour de "Black belt Ricky funko" de réveiller ses ambiances psychédéliques faites de divagations acides menées par une guitare sous psychotrope et par un orgue Hammond qui s'insinue dans le moindre espace qui lui est laissé, pire que la mérule ! La flûte y fait une apparition remarquée dans un style hallucinations sonores lysergiques. "Sorrow and Justice" transporte immédiatement l'auditeur dans un monde à l'atmosphère exhalant une odeur suffocante de souffre. La fin du titre est une longue souffrance spasmodique illuminée par des éclaires de guitare à la Hendrix. La face A se termine à fond avec "Shiftgears" qui peut être appréhendée comme une synthèse de tout ce qui a été précédemment entendu avec à nouveau un final orgiaque.
Juste le temps de retourner le vinyle et c'est reparti avec "Ambush of summertime", un titre qui prend son temps pour groover à la Meters. On jurerait entendre les riffs vénéneux de Leo Nocentelli avant que la flûte, cette fois beaucoup plus incisive, vienne se challenger avec la guitare. Étonnant mais jouissif. La dernière partie est une longue cavalcade qui se termine subitement en no way. Avec "Bulglary times", on retrouve l'ambiance funky de "Dirty Larry" et le duel entre la guitare électrique et l'orgue Hammond est absolument époustouflant. Sachez qu'à ce petit jeu dangereux, il n'y a pas de perdant mais bien deux gagnants. "Hospital Shootout" permet à tout le monde de souffler. Le titre démarre sur un tempo plus calme et se présente comme une longue jam. On retrouve la flûte qui se place en contrepoint de la guitare, l'orgue prenant un rôle d'accompagnant. Mais une fois encore, le meilleur se trouve en bout de piste, l'orgue revenant sur le devant de la scène pour faire jeu égal avec la guitare électrique. "Three times of violence" nous replace dans cette ambiance unique des vieux films policiers italiens qui avaient la bonne habitude de permet comporter le mot violenta dans leur titre (relisez bien le titre du morceau ! OK ?). Bien sûr les cuivres sont aux premières loges et c'est vraiment bon. On termine avec le titre bonus, "B(r)ear(h)lessness", un rock acide psychédélique, survolé par la guitare de Francesco Resta qui s'amuse comme un petit fou avec sa Big Muff et sa pédale wah-wah pour ce qui ressemble beaucoup à une improvisation avec un section basse/batterie en roue libre.

Voilà, vous avez compris : avec Trigemino, nous partageons pour l'éternité le même oremus incantatoire. In sound we trust !

Le groupe : Alessandro Nanni (batterie), Francesco Resta (guitares), Riccardo Tulipani (basse)

+ Diego foschi (Moog, orgue Hammond), Lorenzo Gabriele (flûte), Mattia Del Forno (synthé), Nicola Bagnoli (orgue Hammond), Simone Bellagamba (bugle, trompette)


La tracklist :

Face A :
1) Dirty larry
2) Black belt Ricky funko
3) Sorrow and justice
4) Shifting gears

Face B:
1) Ambush of summertime
2) Bulglary times
3) Hospital shootout
4) Three times of violence
5) B(r)ear(h)lessness

Voici le lien bandcamp pour écouter tout çà en boucle car pour ce qui est de dégoter l'album au format physique, je vous souhaite bonne chance car avec seulement 300 copies CD et 300 copies vinyle mises sur le marché, il se peut qu'il vous faille un peu de patience avant de toucher le graal.

 

vendredi 17 mai 2024

Prog Fest 2024 - Porto Antico Genova

Amateurs du meilleur rock progressif italien mais aussi des musiques du cinéma italien des '70, le rendez-vous incontournable de l'année 2024, c'est à Gênes, les 3 et 4 août 2024, pour assister à une série de concerts tous plus attirants les uns que les autres avec La Maschera di Cera, La Grazia Obliqua, Universal Totem Orchestra (+ Sophya Baccini), L'Ombra della Sera, Il Segno del Comando ET Fabio Frizzi avec son programme unique "Frizzi 2 Fulci" ! Mais aussi Horror Bach, Gotho et Delirio and The Phantoms. Cela se passe comme d'habitude au Porto Antico et c'est organisé par Black Widow Records (Massimo Gasperini et Pino Pintabona).

 

jeudi 16 mai 2024

Metronhomme : Metropolis by Metronhomme

Vous savez que je suis de près le parcours de Metronhomme (voir articles et interviews dans ce blog), ce groupe venant de la région des Marches, qui a, je trouve, une démarche artistique originale en toute circonstance. Et c'est bien de cela dont il s'agit encore cette fois avec ce projet un peu fou intitulé "Metropolis by Metronhomme". Il s'agit d'une expérience cinématographique particulière combinant le chef-d’œuvre emblématique de Fritz Lang avec une nouvelle illustration musicale jouée en direct. La partition a été composée par le groupe en ayant l'idée de synchroniser parfaitement la musique avec les images du film. Le spectacle in vivo est conçu pour permettre aux spectateurs de vivre un moment audio-vidéo immersif afin de les transporter dans un voyage passionnant à travers le monde visionnaire de Metropolis. Le film est projeté sur grand écran pendant que le groupe interprète en direct la bande son. Les cinéphiles avertis remarqueront au passage que Metropolis est présenté avec un nouveau montage revu et restauré en haute définition, contenant des scènes précédemment coupées, ce qui porte la durée du film à environ 1 heure et 20 minutes. Cette version remontée garantit une qualité visuelle impeccable et un rythme plus engageant pour les spectateurs. 

Pour rappel, ce long métrage muet en noir et blanc, a été tourné entre 1925 et 1926, est sorti en 1927 et raconte une histoire qui se déroule en...2026, celle d'une mégalopole (Métropolis) organisée en société hyper hiérarchisée, avec un d'un côté une caste dominante de riches oisifs et de l'autre, une classe ouvrière exploitée et opprimée. Un savant fou va alors créer un, ou plutôt une, androïde ayant pour mission d'inciter le peuple à la révolte. La vraie histoire du film commence là et je vous laisse la découvrir si vous ne la connaissez pas déjà. Je peux en tout cas affirmer que, compte-tenu de sa date de création, ce film est incroyablement futuriste et fantastique. Malgré ses imperfections et son côté parfois un peu trop théâtral à la limite du pompeux, il reste un chef d’œuvre du cinéma muet d'avant guerre. Certaines séquences dégagent un mouvement étonnamment fascinant et une vraie puissance évocatrice.

De nombreux artistes se sont essayés à un soundtrack intégralement recréé pour musicaler à leur manière Métropolis. On citera pour les plus connus Giorgio Moroder en 1980 (avec Jon Anderson, Freddie Mercury, Pat Benatar, Bonnie Tyler), Art Zoyd en 2002 et plus récemment Cult of Luna en 2013. Pour ce qui concerne nos amis de Metronhomme, le résultat est remarquable. Il est clair que cette bande sonore, tout spécialement conçue pour coller aux images du film, ajoute une atmosphère captivante à la projection. Je ne vais pas les citer ici, mais il y a plusieurs séquences clés du long métrage qui prennent une dimension réellement prenante avec l'habillage musical conçu par les artisans de Metronhomme. A la vérité, j'ai écouté les 75 minutes de la bande son avec et sans les rushs et çà fonctionne bien dans les deux cas. Ce qui veut dire que cette musique se suffit à elle-même. Évidemment sans les images, il manque une dimension mais cela reste très intéressant à écouter dans un style polyforme mélangeant le planant, le floydien, la M.E., le psychédélique, parfois le romantisme classicisant, avec aussi quelques montées en puissance rock du plus bel effet placées à des moments stratégiques du film. Pour moi, le pari est largement réussi, et même un peu plus, car tenir la distance sur plus d'une heure de musique d'accompagnement (car c'est bien de cela dont on parle) sans que le niveau d'intérêt ne baisse à aucun moment, et sans s'éloigner du sujet, est quand même un exercice de style de haut vol que Metronhomme réussit haut la main.

Les membres du groupe m'ont affirmé qu'ils cherchaient des scènes pour reproduire cette performance  en live. Ce serait vraiment bien qu'ils puissent y arriver à l'instar de ce que font RanestRane ou Le Zoo di Berlino. Mais une version CD ou/et vinyle album pourrait également parfaitement tenir la route et donner ainsi une digne suite à l'album "4" qui date déjà de 2019. 

La performance s'est déroulée le 7 avril  au Cineteatro Excelsior de leur ville de cœur, Macerata. Vous pouvez la regarder et l'écouter en cliquant sur ce lien "Metropolis by Metronhomme".










jeudi 9 mai 2024

Celeste : Echi di un futuro passato

Belle couverture, n'est ce pas ? Il s'agit du dernier album en date composé et enregistré par le seul Ciro Perrino qui fait ainsi perdurer dans le temps le nom du groupe Celeste. Mais bien que Ciro Perrino assure également les parties de claviers (Mellotron, orgue Hammond, Solina, Eminent, Arp 2600) ainsi que le chant, il sait s'entourer d'autres instrumentistes que sont Mauro Vero pour les guitares, Enzo Cioffi pour la batterie, Francesco Bertone pour la basse et Marco Moro pour les instruments à vent (flûtes, saxo...) auxquels ont peut encore ajouter Marco Canepa au piano, Sergio Caputo au violon, Paolo Malfi aux saxophones contralto et tenor et Ines Aliprandi au chant soliste (sur "Madrigale" et "Circonvoluzioni"), magnifique musicienne au passage, qui est également pianiste. Nous avons donc là en fait un groupe au complet et finalement plutôt bien étoffé. 
Ciro Perrino n'a jamais été un adepte d'un prog rock pur et dur, loin de là même. Il développe plutôt depuis longtemps une vision soft d'un progressif qui se nourrirait à la fois du jazz et du classique avec parfois quelques pointes folk et ethniques apportées par les vents. Autant vous dire que Echi di un futuro passato ne déroge pas à cette ligne de conduite et permet même à Ciro Perrino de continuer à démontrer ses penchants pour une musique qui se veut en toute circonstance mélodieuse et académique, harmonieuse et reposante, j'irais même jusqu’à dire cajoleuse car c'est le mot qui me vient à l'esprit à l'écoute de cet album. Il y a sûrement un moment privilégié dans la journée de chacun pour écouter ce genre de musique. Je vous laisse donc choisir le votre et je vous souhaite une beau voyage sonore qui pour moi trouve son point culminant incontestablement avec "Circonvoluzioni".    

La tracklist :

  1. Pigmenti
  2. Sottili armonie
  3. Aspetti astratti
  4. Altese sottese
  5. Misteri evoluti
  6. Madrigale
  7. Circonvoluzioni

Le lien bandcamp de Celeste/Ciro Perrino, c'est ici.

mercredi 1 mai 2024

Riccardo Zappa : Gabri flies to Italy

 

Il est sans doute utile de présenter Riccardo Zappa qui, bien que portant un nom célèbre, reste un inconnu pour beaucoup. Né en 1951, Riccardo Zappa est un guitariste de formation avant tout classique. Il a émergé dans la deuxième partie des années soixante dix en proposant quatre albums solo de grande qualité dans un registre instrumental mêlant ses origines classiques, ses influences folk et son penchant pour une pop oscillant entre Mike Oldfield et Steve Hackett avec toujours, et c'est l'intérêt du bonhomme, une volonté de recherche et d'innovation. Il a de ce fait été associé à la musique progressive même s'il faudrait plus le considérer comme un électron libre, un performer ne représentant que lui-même. Celestion, sorti en 1977, est sûrement son meilleur album, mais Chatka (1978), Trasparenze (1980) et Haermea (1982) sont également des disques importants qui méritent attention. Tout en continuant à enregistrer des albums il a entamé une grande carrière de musicien professionnel accompagnant des artistes italiens aussi célèbres que Mina, Fiorella Mannoia, Mia Martini, Eros Ramazzotti, Eugenio Finardi ou encore Giorgio Gaber. A ma connaissance son dernier album solo datait de 2007 (Ali e radici) et l'homme se faisait discret. On l'avait toutefois revu en concert au festival Prog and Frogs en 2018. Depuis plus rien.
Ce nouvel album, son vingt quatrième, est donc une petite surprise. Gabri flies to Italy est dédié à Gabriel, le frère de Riccardo, album hommage donc, on l'aura compris.
Le disque commence par "Gabri Flies to Italy", une suite de plus de dix huit minutes qui s'avère très vite être une grande épopée instrumentale. Riccardo Zappa y joue de la guitare 6 cordes et de la 12 cordes mais aussi de la guitare électrique. Cette longue pièce alterne les passages proches de pièces classiques avec d'autres plus enlevés, les nappes plus mystiques quasi New Age avec des touches technoïdes, sans oublier les interventions d'un chœur donnant à plusieurs reprises un côté très musique de film à ces petites séquences idylliques (et morriconienne au moins pour la première d'entre elles). La force de Riccardo Zappa réside aussi dans son originalité. Là où "Harmonios" devait se dérouler tranquillement comme une gentille bluette popisante sur un rythme sud-américain à peine marqué , l'intervention soudaine d'un quatuor de mandolines en fait une pièce pittoresque faisant remonter des souvenirs de soundtracks de westerns de la fin des années soixante. Quant au romantisme, il revient dans la pièce "Sanvalentiniana" la bien nommée, dans laquelle Riccardo Zappa en donne sa propre lecture musicale qui ne manque pas de personnalité. Si vous voulez entendre Riccardo Zappa dans un exercice solitaire, proche d'une étude classique, alors écoutez "inno". C'est simple, c'est posé mais c'est surtout très beau. "Nimaster Ego " permet de retrouver le chœur à quatre voix évoluant avec grâce sur une rythmique programmée. Riccardo Zappa est devenu une référence, un maître (un statut parfaitement mérité au passage), pour plusieurs générations de guitaristes. Alors, il a proposé à ces derniers d’envoyer une seule note produite par leur instrument, afin de les regrouper et de les utiliser dans le morceau "Suonami una nota" qui est ainsi un patchwork de dizaines de notes produites par autant de guitaristes différents (quarante deux exactement). C’est la vision qu'a Riccardo Zappa de la relation qui peut être créée entre lui et d'autres musiciens en passant d’un contact virtuel à un autre, beaucoup plus réel et tangible celui là, puisqu'il est destiné à rester gravé dans la musique et le temps. Le résultat est assez bluffant même si Riccardo n'a fait que les ajouter à une composition déjà existante qui s'avère plutôt catchy (à l'échelle de ce que l'on entend sur le reste du disque bien sûr).
Cet album est beau moment de respiration. Il est fait d'atmosphères présentant des ambiances très lumineuses qui semblent vouloir s'épandre (et se répandre) dans l'espace sonore avec une dynamique remarquable. Riccardo Zappa n'essaie pas d'imposer à tout prix sa technique à la guitare, ce n'est pas une fin en soi pour lui, mais elle lui permet d'exposer avec assurance des thèmes avec une précision et une clarté qui font la différence à chaque fois.
Si vous avez zappé ce Zappa, il n'est pas trop tard, Gabri flies to Italy est une très belle occasion de vous rattraper.

La tracklist :

1) Gabri Flies to Italy (18:51)
2) Harmonios (4:32)
3) Sanvalentiniana (6:38)
4) Inno (4:34)
5) Suonami una Nota (4:41)
6) Nimaster Ego (3:18)
7) L'Attesa (2:28)

Label : M;P. & Records

Distribution : G.T. Music

lundi 22 avril 2024

Louis de Ny : l'aventure continue


Goblin, Diabolus in Musica, acte mon cinquième livre sur l'histoire élargie du rock progressif italien,. Il faut bien sûr ajouter la version en italien de la bio de Patrick Djivas, qui est, je le précise à nouveau, un ouvrage partiellement différent de la version française. Cette aventure, démarrée il y a maintenant plus de dix ans, est aussi une formidable aventure humaine faite de rencontres, de collaborations et d'échanges. 

D'autres projets sont en cours, certains aboutiront, d'autres pas. C'est la loi de la sélection naturelle quand on applique un certain niveau d'exigence à ce que l'on veut produire et proposer à un public averti ! C'est en tout cas un plaisir sans cesse renouvelé pour moi et beaucoup de vibrations positives ressenties. Merci à celles et ceux qui me font la joie de m'accompagner dans cette aventure à travers mes livres et mon blog 🙏🙂.

dimanche 21 avril 2024

Submarine SIlence : Atonement of a Former Sailor Turned Painter (scoop for you)

Voici en avant première la très belle pochette (signée de l'incontournable Ed Unitsky) me permettant de vous annoncer la sortie du nouvel album de Submarine Silence, prévue pour juin : Atonement of a Former Sailor Turned Painter

A côté des deux membres permanents du groupe (Davide Cremoni et Cristiano Roversi) on trouve le chanteur Guillermo Gonzales (déjà présent sur les deux précédents albums), Maurizio Di Tollo à la batterie, Marco Croci à la basse et Manuela Milanese au chant. Je peux également déjà vous annoncer un invité surprise de qualité sur le premier morceau.

La suite dans quelques semaines !

mardi 16 avril 2024

Louis de Ny : Goblin - Diabolus in Musica

Voici mon nouveau bébé dont je suis évidement très fier ☺️ Mais je suis d'autant plus heureux que ce livre m'a permis d'associer deux belles personnes, Christophe Goffette pour la préface et Joël Contival pour l'artwork de la couverture. Qu'ils en soient infiniment remerciés 🙏 

Vous l'avez compris Goblin - Diabolus in Musica raconte l'histoire passionnante du groupe Goblin 😈. Le livre sort le 30 avril chez Camion Blanc et il est déjà possible de le précommander sur toutes les plateformes de VAD dédiées à la littérature.

lundi 15 avril 2024

Nagual : And once the storm is over ...


Voici Nagual, un groupe de rock italien, originaire de la province de Piacenza, créé en 2006. Actuellement composé de six membres, le combo est actif depuis près de vingt ans sur les scènes rock de Plaisance et Pavie. Cinq albums ont précédé ce And once the storm is over qui est sorti le 26 mars 2024.
Le titre de l'album est tiré du roman Kafka on the Shore écrit par le Japonais Haruki Murakami dont je vous cite une longue phrase qui résume assez bien l'ambiance du livre : « Et puis, quand la tempête sera terminée, vous ne saurez probablement même pas comment vous vous en êtes sorti et comment vous êtes encore vivant. En fait, vous ne saurez même pas si tout cela est vraiment fini. Mais il n’y a aucun doute sur une chose ; c’est que, une fois sorti de cette tempête, vous ne serez plus le même que celui que vous étiez avant de l'affronter. »
Pour les membres du groupe Nagual, le titre et la première piste introduisant l'album semblaient parfaits pour un disque qui voit le jour presque trois ans après la période difficile de la pandémie avec les vicissitudes qu'ils ont traversées pendant cette période, comme tous les groupes et artistes, avec aussi des changements de line-up et des problèmes personnels qui à plus d’un titre ont marqué leur chemin. Ainsi les paroles restent toujours très introspectives, liées au monde des souvenirs et de l’abandon. Le titre "Life kills you" est dédié à la mémoire du regretté Luigi 'Betty Blue' Milani, décédé début février 2024, qui a joué avec les groupes Not Moving, Timepills et Lilith and the Sinnersaints. Malgré cela, "Life kills you" est un hymne à la vie également inspiré par la force de vivre et de réagir. Dans un autre registre, la chanson "Waterwall" célèbre le pouvoir féminin, qui est assimilé à l’eau comme une force vitale primordiale.
Les musiciens de Nagual revendiquent des influences multiples qui vont de Led Zeppelin, Black Sabbath, Deep Purple, Whitesnake, Soundgarden, Temple of the Dog, Alice in Chains, et plus généralement, tout le blues rock et le rock progressif des années 70 ainsi que le grunge des années 90. De fait, musicalement, la voie empruntée est plus complexe et diversifiée que sur les albums précédents. Des traces de rock progressif peuvent être détectées dans des titres tels que 'When memories are blind', 'Waterwall' mais aussi dans la section centrale instrumentale du morceau "Too far gone!", mais tout au long de cet album, on ressent clairement et avant tout une sensibilité hard rock pur et dur, flagrante qui revient inéluctablement dans des titres comme "Life kills you", "Going nowhere" et "Wildfire", tout cela rappelant pas mal Buttered Bacon Biscuits, Witchwood voire Wicked Minds, côté italien.
En résumé, çà fleure bon le hard vintage à l'ancienne typé Whitesnake mais, et c'est un point essentiel, ce disque de Nagual reste loin de ces albums monolithiques, qui sont légions dans le hard prog revival. Ainsi, And once the storm is over propose suffisamment d'ambiances variées et de subtilités pour procurer à l’auditeur une véritable écoute plaisir. Nul doute que ce groupe sera une belle découverte pour beaucoup.


Le groupe : Luca Sabia (chant et guitare), Davide Belfiglio (guitare), Giulio Armanetti (basse), Claudio Bianchi (batterie), G. Fabrizio Defacqz (claviers et chant), Sara Battisteri (chant)

La tracklist :

1. And When the Storm Is Over...
2. Going Nowhere
3. Fading Away
4. Too Far Gone!
5. Life KillsYou
6. Where Memories Are Blind
7. Wildfire
8. Waterwall

Le lien bandcamp pour écouter tout çà : Nagual And once the storm is over

 


mercredi 10 avril 2024

Le Orme : Il Leone e la Bandiera

Après la sortie du coffret 3 CD Le Orme and friends en 2023, voici (enfin) l'album studio seul. Il Leone e la Bandiera est publié en LP vinyle à 500 exemplaires numérotés. Cela me semble une très bonne initiative car, comme je l'avais largement étayé dans ma chronique de l'époque, cet album est excellent alors même que les deux autres CD du coffret sont largement dispensables.


Le vinyle est distribué par Orangle Records (vous cliquez directement sur le nom pour accéder au site). Attention toutefois aux frais de port prohibitifs ! Et voici le lien pour la version CD : Orangle Records CD


vendredi 5 avril 2024

Zio Crocifisso


Je relaie ici l'appel de PAolo Botta, on ne sait jamais. En attendant mieux, vous pouvez déjà écouter ce titre extrait de l'album en question.  

ziocrocifisso.bandcamp.com/album/campana-di-legno

"Chers abonnés de SKE, je travaille avec un groupe de nouveaux et jeunes musiciens depuis un certain temps déjà. Nous avons enregistré un album dont le nom est Zio Crocifisso avec l’aide d'amis et de musiciens incroyables : Thea Ellingsen Grant au chant, Simen Ådnøy Ellingsen aux instruments à vents, Jacopo Costa au vibraphone et ma fille Margherita au chant. Le style est assez difficile à cerner, car nous avons tous des goûts musicaux assez différents, et bien que nous ayons des goûts communs, nous nous sommes retrouvés à fusionner nos visions de manière créative, plutôt que de choisir un terrain d’entente dans lequel travailler. Cela dit, tous ces genres ont trouvé leur place dans ce projet : avant prog, math rock, expérimental, prog rock, brutal prog, post rock. Les idées pour l’album viennent du livre écrit en par Verga, I malavoglia. Livre étonnant. L’album est maintenant disponible en précommande numérique, et sortira en version numérique ce samedi 6 avril, lorsque nous jouerons en direct au Circolo Agorà près de Milano.
En outre, nous sommes actuellement à la recherche d’un label intéressé pour la sortie physique, donc si vous avez des suggestions ou êtes intéressé, s’il vous plaît nous envoyer un message".

"Dear SKE followers, I've been working with a group of new and young musicians from quite some time now. We recorded an album under the name of ZIO CROCIFISSO with the help of our friends and amazing musicians: Thea Ellingsen Grant on vocals, Simen Ådnøy Ellingsen on winds, Jacopo Costa on vibraphone and my daughter Margherita on vocals. The style is quite difficult to pinpoint, as we all have rather different tastes in music, and albeit we do have common likes, we found ourselves merging our visions in a creative way, rather than choosing a common ground to work into. That being said, all these genres did find place in this project: avant prog, math rock, experimental, prog rock, brutal prog, post rock. The ideas for the album are coming from 1881's Verga's "I malavoglia" book. Amazing book. Album is now available in digital preorder, and will be digitally released this saturday 6th of April, when we will play live at Circolo Agorà venue near M ilano.
Also, we are currently looking for an interested label for physical release, so if you have suggestions or are interested, please drop us a line".

Les musiciens :

PAolo "SKE" Botta (Yūgen, SKE, Not a Good Sign) : claviers
Dario Magri (Yokoano, Sho) : batterie
Matteo Serenelli (The Appetizers) : guitares

Avec :
Thea Ellingsen Grant (Juno) : chant
Simen Ådnøy Ellingsen (Shamblemaths) : saxophones
Jacopo Costa (Yūgen, Loomings, Oiapok) : vibraphone
Margherita Botta : chant

La tracklist :

  1. Lievito Madre (part I - IV)
  2. Metaxu
  3. Margherita legge Umberto G.
  4. Vince
  5. La malabestia de Calafato
  6. Speziale
  7. La Malora


lundi 1 avril 2024

Arcansiel : Hard Times

Trente ans après son dernier album (Normality of perversion), le groupe italien Arcansiel réapparaît à son tour. Créé en 1986 par le claviériste Marco Galletti (compositeur unique à l'époque) et le batteur Gianni Lavagno, le groupe avait sorti deux bons albums de néo prog (Four Daisies en 1988 et Stillsearching en 1990). Le ton était complètement ancré dans son époque mais avec quelques belles envolées typiquement latines. Dès 1994, Lavagno avait perdu son compère Galletti remplacé par un garçon ma foi plutôt très doué en la personne de Paolo Baltaro, à qui l'on doit l'étonnant et très moderne suite  "Holy Wolf suite". Après 1994, le groupe avait coupé le contact et la seule preuve de vie avait été la compilation Swimming in the Sand, publiée en 2004, regroupant des morceaux des trois albums du groupe. Compilation que je vous recommande d'ailleurs car six morceaux avaient été réenregistrés pour l'occasion, dans de très bonnes conditions avec justement Paolo Baltaro à la manœuvre et la très chère Barbara Rubin au violon.

En 2024, le batteur Gianni Lavagno a ressenti le besoin de relancer Arcansiel. Pourquoi pas ! Mais il faut bien intégrer que la formation est renouvelée au 4/5 et que les quatre titres ont été composés par de nouveaux musiciens (Lombardo - Sorella - Valvo). Dans ces conditions, et sans préjuger du résultat, l'utilisation du nom Arcansiel doit être confrontée au contenu de ce nouvel album.
L'essentiel est bien là, et çà tombe bien car finalement, musicalement, çà tient drôlement bien la route. Il ne reste plus grand chose du néo prog, désormais démodé, qui est en partie supplanté par un prog plus symphonique et surtout fort sympathique. Le nouveau claviériste, Davide Sorella, est une très bonne pointure et je le soupçonne d'être l'auteur de "Too late", la longue suite de dix huit minutes très réussie. Arcansiel a toujours eu des chanteurs convaincants et Marco Leccese ne déroge pas à la règle. Il assure vraiment bien au chant en anglais dans un ton qui évoque beaucoup Peter Gabriel, ce qui n'a rien de désagréable bien au contraire. Le morceau suivant, "Puppets and Puppeteers", est plus direct et fait penser à du Fish de la grande époque (en plus travaillé quand même). Il n'en reste pas moins très accrocheur et permet de découvrir le guitariste Sebastiano Valvo dans ses œuvres. La superbe ouverture de "Heaven is not here" (quatre minutes au compteur) a également le mérite de démontrer que les membres du groupe ont réalisé un travail réellement soigné. En clair, c'est une des plus belles intros que j'ai écouté depuis longtemps. La suite du morceau, chantée, confirme les qualités de mélodistes de ces musiciens. Bien sûr, cela évoque un peu, beaucoup, le Genesis de Wind and Wuthering (jusqu'à la septième minute) mais c'est beau et surtout très bien fait. Donc, on ne va quand même pas bouder notre plaisir, d'autant plus que la dernière partie de la piste (à partir de la septième minute) nous offre un emballement baroque des plus réjouissants sur un tempo soutenu, avant le final chanté dans un style pompeux parfaitement raccord. Avec "My old same mistakes", le groupe fait mieux que maintenir le niveau. Il finit en beauté ! Cela fait toujours penser à du Genesis, plutôt du côté Phil Collins cette fois, mais çà s'écoute avec un réel plaisir et puis le très long pont instrumental est quand même, une fois encore, sacrément bien foutu dans un style classicisant  qui ne peut être produit que par des Italiens qui pour nous faire plaisir nous offrent, après le solo de basse de Felice Lombardo, une fin d'album de haute volée à la IQ (je précise que c'est un compliment).

Voilà donc une bonne surprise que l'on attendait pas (c'est çà les belles surprises !) et il y a fort à parier que cet album va plaire à un public assez large, car il est à la fois, consensuel, qualitativement irréprochable et surtout très beau. Retour gagnant pour Arcansiel.

Le groupe : Gianni Lavagno (batterie, percussions), Marco Leccese (chant lead), Felice Lombardo (basse), Davide Sorella (claviers), Sebastiano Valvo (guitares, chœurs).

 

La tracklist :

1. Too Late (17:51)
2. Puppets and Puppeteers (7:51)
3. Heaven is not here (11:22)
4. My old same mistakes (7:27)


Voici le bandcamp du groupe : Arcansiel



jeudi 21 mars 2024

Dalton : Una Riflessione

Annoncé depuis un moment aux initiés, voici une sortie intéressante dans le cadre du Record Store Day 2024. En effet, le label milanais AMS publie un vinyle au format 12" mais en lecture 45 tours avec 4 pistes. Il s'agit de deux titres emblématiques tirés du LP de 1973 du groupe Dalton Riflessioni : idea d'infinito. Chaque morceau (" Riflessioni" et " Idea d’infinito) est présenté en deux versions (chantée et instrumentale). 

Les musiciens associés pour ce projet sont des tous bons : Aronne Cereda (Dalton) au chant et à la guitare acoustique, Mikael Åkerfeldt (Opeth) aux guitares électriques, Cristiano Roversi (Moongarden, Submarine Silence, Il Porto di Venere) aux claviers, Enrico Gabrielli (Calibro 35) à la flûte, Diego Petrini (Il Bacio della Medusa) à la batterie et Marco Croci (Julius Project, Maxophone, Jumbo et Submarine Silence) à la basse.

Sous la direction artistique de Cristiano Roversi et aiguillé par le seul membre original du groupe, Aronne Cereda, le projet a pris forme avec l'idée de  réenregistrer complètement deux titres du LP légendaire de 1973 avec un son moderne mais en restant aussi fidèle que possible à l’esprit d'origine. Le résultat est absolument génial et démontre que cette musique n’a rien perdu de son charme intemporel. 

Le LP Una riflessione sort le 20 avril 2024. Il est pressé en vinyle orange clair (12 pouces, 45 tours).

Label :  AMS

 

dimanche 17 mars 2024

Anandammide : Eura

En 2020, Anandammide publiait son premier album Earthly Paradise, chez Lizard Records, et ce projet drivé par un italien, joués par des musiciens de plusieurs nationalités et ancré dans le folk anglais le plus traditionnel, se révélait une belle surprise rafraîchissante (voir ma chronique ici).
Le 5 avril 2024, Anandammide sort son deuxième album, Eura, enregistré entre la France, la Suède et l'Italie. Michel Moschini, le plus français des Italiens (il vit à Paris depuis 2007), a reconduit le principe d'une formation cosmopolite, toutefois sensiblement plus étoffée qu'il y a quatre ans. Audrey Moreau, Stella Ramsden, Pascal Vernin font désormais équipe avec Lisa Isaksson, Sébastien Grignon, Lelio Mulas et Lorenzo Castigliego.Michele a en effet demandé à deux vieux amis italiens (Lelio Mulas et Lorenzo Castigliego) de le rejoindre pour cet album. Mais surtout, le groupe intègre une chanteuse en la personne de Lisa Isaksson (Me and my Kites et Lisa o Piu) dont le profil artistique colle parfaitement avec la sensibilité musicale d'Anandammide.
Eura est cette femme idéalisée, personnage clé de l’œuvre graphique (le terme bande dessinée ne me paraît que partiellement approprié) réalisée par Dino Buzzati, Orfi aux enfers, une transposition moderne du mythe d'Orphée dans le milieu de la pop de la fin des années soixante à Milan. Pour ceux qui ne voient pas (c'est le cas de le dire), Dino Buzatti avait dessiné Eura avec quatre yeux dans une tentative assez naïve d'illustration surréaliste (en fait une représentation des visages superposés des deux héros Orfi et Eura).
Avec ce deuxième album, Anandammide se détache partiellement des influences médiévales et baroques qui étaient si prégnantes sur Earthly Paradise pour se rapprocher d'un folk progressif plus contemporain, celui du début des seventies. Et par la même, la musique délaisse son orientation acoustique pour discrètement s'électrifier. Mais il reste l'essentiel, c'est à dire une grande délicatesse dans les thèmes mélodiques proposés mais aussi un sentiment permanent d'harmonie et de sérénité. Si la flûte garde un rôle de soliste, le violon et le violoncelle sont utilisés comme un petit ensemble de musique de chambre. N'imaginez surtout pas que tout cela est naïf et lénifiant. J'en veux pour preuve un morceau comme "Phantom limb" qui possède une pulsation interne très originale. Je parle aussi des deux "singles" ("A song of Greed" et "Eura") qui ont un vrai potentiel pour toucher un public plus large tout en restant d'une qualité irréprochable.    
Au gré de l'écoute des morceaux, vous serez surpris de penser à des noms connus et pas des moindre, souvent plus par un effet de mimétisme que par une volonté délibérée d'imitation. Côté prog, je vous cite comme çà à la volée le early Pink Floyd (dans la première partie de "A song of Greed", dans certaines intonations chantées de "Post Atomic Reverie"), Caravan ("I am a flower") et même Porcupine Tree (la suite d'accords de "The Anchorite"). Côté folk c'est plus diffus, je vous laisse chercher mais vous verrez que vous  découvrirez bien d'autres références au détour d'un couplet ou d'un refrain, références qui étaient  de toute façon déjà évoquées dans la chronique du premier album.
Anandammide c'est toujours aussi harmonieux et poétique, onirique aussi ("The Orange Flood" et "Dream n° I") mais avec Eura le projet de Michele Moschini franchit un cap important. D'abord, car il montre sa capacité à évoluer et à ne pas se cantonner dans le genre folk anglais médiéval qui a quand même ses limites. Ensuite car je trouve que l’électrification de sa musique lui permet de gagner en relief et en intensité. Enfin, car je pressens un troisième album encore plus abouti et encore plus progressif (peut être est-ce aussi un souhait de ma part que voudra bien entendre Michele !).
Si je devais résumer cet album en un mot, ce serait sérénité.

Le groupe: Michele Moschini (chant, guitares, synthé, orgue, batterie), Lisa Isaksson (chant sur 2, 6, 10), Audrey Moreau (flûte), Stella Ramsden (violon), Sébastien Grignon (violoncelle), Lelio Mulas (basse sur 2, 3, 4, 8, 10), Pascal Vernin (basse sur 1, 5, 6, 7 et 9), Lorenzo Castigliego (guitare électrique sur 6)


La tracklist (les titres soulignés peuvent être directement écoutés sur YT) :
01. Carmilla
02. A song of Greed (2ème single)
03. Post-Atomic Reverie
04. Phantom Limb
05. I am a Flower
06. Eura (1er single)
07. The Orange Flood
08. Lullaby n° II
09. Dream n° I
10. The Anchorite

L'album est sorti aux formats LP et CD ainsi qu'en numérique chez Sulatron Records (distribution : Clearspot)
Le lien bandcamp du groupe : Anandammide

 

 

jeudi 14 mars 2024

Acqua Fragile : Moving Fragments

Quand je parlais l'autre jour (dans l'article concernant le nouvel album de Semiramis) de résurrections récentes de vieux groupes avec des revenants moisis, je faisais allusion, entre autres, à Acqua Fragile et à ce Moving Fragments qui n'apporte rien au schmilblick et qui dessert le nom du groupe plus qu'autre chose. Tout n'est pas mauvais bien sûr ("Black drone", avec David Jackson aux vents, sauve l'honneur) mais il y a beaucoup trop de défauts dans cet album pour le justifier. Je ne détaille pas par pudeur mais disons quand même qu'il y a quelques initiatives que je qualifierais de malheureuses du côté chant. A New Chant sorti en 2017 me semblait plis digne d'intérêt. Et pourtant, j'ai de l'affection pour Bernardo Lanzetti, vous le savez !     

Le groupe : Bernardo Lanzetti (chant, guitare), Stefano Pantaleoni (claviers), Claudio Tuma (guitares), Rossella Volta (chant), Franz Dondi (basse), Piero Canavera (batterie, percussions, voix).

Musiciens invités : Stef Burns (guitare sur 2), Brian Belloni (guitare sur 4), Davide Piombino (guitare 7 cordes sur 5), David Jackson (saxophone et flute sur 6), Gigi Cavalli Cocchi (batterie sur 1 et 6), Sergio Ponti (batterie sur 4 et 9).

La tracklist :

1. Her Shadlows Torture
2. White Horse on Dope
3. Moving Fragments
4. Malo Bravo
5. IA - Intelligenza Artificiale
6. Black Drone
7. DD Danz
8. Il Suono della Voce
9. Limerence Ethereal

dimanche 3 mars 2024

Leviathan : Hearthquake (redux 2024)

Ne voilà-t-il pas qu'un nom enfoui loin dans notre mémoire de progueux remonte à la surface : Leviathan ! Car voici que sort chez AMS Records Heartquake / Redux, qui est en fait le réenregistrement du premier album de ce groupe italien. Je fais court. L'histoire est simple, les trois membres encore actifs se sont payés le luxe de refaire une version améliorée de leur LP avec des moyens technologiques mais aussi avec l'expérience (et peut être des moyens financiers) qu'ils n'avaient pas à l'époque, c'est à dire en 1988. 

La formation responsable de ce redux (je crois que je ne me ferais jamais à ce mot) comprend trois membres historiques du groupe : Alex Brunori au chant, Andrea Amici au claviers et Andrea Moneta à la batterie (devenu depuis batteur de Zopp). Ils sont épaulés par Andrea Castelli, un bassiste confirmé qui joue aussi avec Il Rovescio della Medaglia, et Fabio Serra, le guitariste de Røsenkreütz, également producteur et ingénieur du son. 

Les membres du groupe précisent - je cite - " ces retrouvailles, après de nombreuses années, étaient une excellente occasion de ramener un album qui, pour beaucoup de critiques et d'experts, marquait le retour de la musique progressive sur le sol italien dans les années 80". OK, et bien moi je n'avais pas vraiment cette vision des choses, Leviathan était effectivement un des rares groupes italiens à avoir fait du prog à cette période peu porteuse pour le rock progressif mais il m'apparaissait surtout comme une copie honnête de Pendragon, Marillion, IQ et Pallas, sans plus ! Même si l'album de 1990, Bee yourself, avec sa longue suite éponyme de 19 minutes avait permis au groupe de se distinguer. Il est vrai aussi que la musique, intégralement composée par le bassiste Sandro Widerk (qui a depuis longtemps quitté le groupe) tenait bien la route. En fait, c'est plutôt au niveau de l'exécution et du chant en anglais (désastreux) que çà pêchait grave. D'où, sûrement, cette volonté de remettre les pendules à l'heure. Pourquoi pas !
Car la question est la suivante : est-ce que çà valait vraiment le coup de réenregistrer cet album ? Si je me place du côté du groupe, la réponse est indéniablement oui. Le son est vraiment excellent et les parties techniques sont jouées au top (et le chant est largement meilleur). Côté auditeur, cela dépend de la sensibilité de chacun. Cela reste du néo prog qui, du fait des trente cinq ans d'écart, devient daté. Mais je dois dire que cela permet de redécouvrir, dans de plus beaux habits, des morceaux qui méritaient le meilleur. Je pense à "Dream of the cocoon" et surtout à "Hellishade of Heavenue".
Donc, acquérir cette nouvelle version de Hearthquake (amputée de deux titres, j'ai oublié de vous le dire) a finalement du sens et devrait quand même satisfaire la partie du public particulièrement sensible à un néo prog qui est à son tour rentré dans sa période revival.

Le groupe : Alex Brunori (chant), Andrea Monetta (batterie), Andrea Amici (claviers), Andrea Castelli (basse), Fabio Serra (guitares).
 
 
La tracklist :

1. The Waterproof Grave
2. Hellishade of Heavenue
3. Only Visiting This Planet
4. Up We Go!
5. Dream of the Cocoon
6. Heartquake

C'est à écouter ici

 
Label : AMS records
Distribution : BFT.IT
 

vendredi 1 mars 2024

Edmondo Romano : Religio


On connaît bien sûr Edmondo Romano comme membre créateur des groupes Eris Pluvia puis The Ancient Veil. On sait aussi qu'il a déjà publié sous son seul nom deux superbes albums, Sonno Eliso en 2012 et Missive Archetipe en 2014 qui ont fait l'objet d'un article il y a quelques temps sur ce blog "Special Edmondo Romano".  

Dix ans après Missive Archetipe, Edmondo Romano nous propose donc le troisième volet de ce qui semble bien être une vaste fresque explorant les différentes facettes de la condition humaine. L'artworek illustrant la pochette de l’album ainsi que le titre et la note qui le suit ("The Relationship of Man with the Visible and Invisible") sont assez explicites quant au sujet principal qu’Edmondo Romano veut exposer cette fois. Ce troisième chapitre traite le pan spirituel de l'être humain. Mais il faut toutefois préciser que l'approche d'Edmondo Romano dépasse le seul côté religieux pour évoquer aussi les aracanes de la conscience humaine qui passent également par ses racines et sa culture. Les titres des treize pistes vous en diront un peu plus sur le cheminement mystique emprunté par Edmondo Romano.

La solide équipe qui l'accompagne comprend beaucoup de musiciens qui ont l'habitude de travailler avec Edmondo dont le fidèle Alessandro Serri mais aussi Kim Schiffo, Ilaria Bruzzone ainsi qu'un certain Roberto Tiranti parmi les voix, un Roberto toujours aussi étonnant. Ecoutez la chanson "What I want to be" et dites à moi à quel timbre de voix, il vous fait penser. C'est assez bluffant.

On retrouve dans cet album une caractéristique qui apparaissait déjà de manière flagrante avec les deux précédents disques solo d'Edmondo Romano. En effet, le Génois s'affranchit de toute contrainte stylistique pour se permettre une totale liberté de création qui fait que d'un morceau à l'autre, on passe dans un univers musical complètement différent. Edmondo Romano peut se permettre ce genre d'acrobaties tant il maîtrise parfaitement les différents codes musicaux, qu'il s'agisse de courants et de mouvements comme le jazz, la musique contemporaine, le minimalisme, la M.E proche de Terry Riley, l'ambient ou encore de langages (musicaux) ethniques (balkans, Amérique du Sud, Orient et Extrême Orient) dont la forme la plus contemporaine, et la plus facile d'accès, reste la world music. 

Le résultat est d'une richesse folle et il faudrait des heures (et des pages) pour décortiquer chaque morceau. Ce n'est pas le but de cette modeste chronique qui n'est là que pour vous alerter sur cette sortie d'album et vous donner envie de l'écouter. Alors si vous êtes en quête d'une musique à la fois ambitieuse et dépaysante, totalement originale et nourrissante, cet album est fait pour vous. Pour rester dans le registre religieux (même si bon...je vais pas m'étaler sur mes convictions en la matière), ce disque s'écoute comme une messe. Si vous avez un doute, prenez le temps de savourer "in estasi" et "il colore del mio corpo", deux morceaux qui s'écoutent dans un état de total recueillement. Mais ne croyez quand même pas que l'on est dans le contemplatif extrême. Le déjà cité "What I want to be", la deuxième partie d"Agape" (magnifique !), l'insaisissable "La seduzione" et surtout "l'urlo eliso" devraient finir de vous convaincre de la grande beauté mais aussi du caractère indispensable de cet album. Une œuvre rare, tant par sa richesse que pas sa qualité intrinsèque, qui doit absolument trouver son public du fait de son caractère inclassable. Je compte sur vous !

Les musiciens :

Edmondo Romano: saxophones soprano et sopranino, clarinettes en si majeur, en do et en mi majeur, clarinette basse, duduk, chalumeau, low whistle, kanjira, claviers, programmations
Voix : Simona Fasano, Karin Selva, Giulia Beatini, Roberto Tiranti, Paola Cialdella, Vera Marenco, Lydia Giordano, Egle Doria, Silvia Napoletano, Edmondo Romano, Yoko Hanzai (narrateur sur 9)
Tina Omerzo: piano
Luca Falomi: guitare électrique
Alessandro Serri: guitare classique, basse acoustique
Roberto Piga, Teresa Valena: violons
Ilaria Bruzzone: violon alto
Kim Schiffo: violoncelle
Riccardo Barbera: contrebasse
Rodolfo Cervetto: batterie
Olmo Manzano: Percussions
 

La Tracklist :

01 - La creazione (4.07)
02 - Il sacrificio (2.16)
03 - What I want to be (7.27)
04 - In estasi (2.41)
05 - Agape (6.23)
06 - Il colore del mio corpo (3.20)
07 - La seduzione (3.38)
08 - Le tourment (3.44)
09 - Nel mio andarmene (4.06)
10 - La parola IO (4.30)
11 - La scelta (3.26)
12 - Ritus (5.08)
13 - L’urlo eliso (2.41)  

Çà vient de sorti chez Visage Records et c'est distribué par Egea Music.